Buzz et hype conséquents, plébiscite critique, succès commercial, phénomène cinématographique, consécration quasi divine sur le site Rotten tomatoesGet out a tout pété, a tout chamboulé, en tout cas aux États-Unis où les Américains ne se sont toujours pas remis d’une élection présidentielle catastrophique, ceci expliquant peut-être cela : un héros noir, des méchants blancs, et une farce sociale sur le racisme dans un pays au lourd passé ségrégationniste (esclavagisme, Ku Klux Klan…) et à l’avenir incertain avec un Trump pas très enclin à l’ouverture. Ici en France, le film passe davantage pour un sympathique et habile thriller domestique, éventuellement un chef-d’œuvre du genre pour quelques zélateurs qui semblent avoir vu la Vierge.


Chris et Rose forment un couple mixte qui s’aime et qui s’adore, et Chris s’apprête à rencontrer les parents de Rose (deux parfaits spécimens de la bourgeoisie blanche américaine) lors d’un week-end champêtre. Mais Chris va, très vite, se rendre compte que quelque chose ne tourne pas rond dans cette étrange illusion du bonheur. Get out commence et se déroule à la façon d’un cauchemar qui aurait assimilé Devine qui vient dîner ? au meilleur de Polanski (Répulsion, Rosemary’s baby, Le locataire…) avec comportements et situations bizarres, menace latente et paranoïa. Jouant sur le dérèglement progressif des détails du quotidien, des regards et des attitudes, Jordan Peele parvient à instiller une angoisse sourde dans une logique narrative qui prend son temps et se dérobe à toute surenchère (mais pas à deux ou trois facilités).


Mais voilà : la révélation finale, tant attendue, manque pas mal d’audace et de surprise (et vient faire retomber la tension du film en un clin d’œil), tout en restant bien vu, un rien sarcastique dans son fond. Get out aurait pu aller beaucoup plus loin (à la façon d’un Martyrs qui savait radicaliser son propos) dans ce délire de "coagulation" de l’identité noire avec la suprématie blanche, mais préférant, dans son dernier quart d’heure, une sorte de bouillie horrifique vidée de sens à une réelle interrogation (un réel abîme) sur cet eugénisme inversé où le noir deviendrait, a contrario de tant d’exclusion et de racisme, une race à privilégier (pour ses qualités physiques, voir les références à Jesse Owens et Tiger Woods) comme alternative à la décrépitude annoncée du wasp.


Article sur SEUIL CRITIQUE(S)

mymp
6
Écrit par

Créée

le 10 mai 2017

Critique lue 581 fois

7 j'aime

mymp

Écrit par

Critique lue 581 fois

7

D'autres avis sur Get Out

Get Out
BobChoco
5

I told you so

Bon, pour ceux qui n'ont pas vu le film, passez votre chemin. Ce qui m'a attiré de prime abord, c'est le "genre : horreur" annoncé par la com sur la toile couplée au pitch: "Chris est noir. Chris...

le 22 mai 2017

136 j'aime

15

Get Out
Behind_the_Mask
7

I am not your negro

Wahou ! C'est que c'était bien, finalement, Get Out ! Behind est soulagé car il craignait d'avoir payé sa place pour un pamphlet politique qui aurait dépassé son genre de départ, que le masqué...

le 4 mai 2017

120 j'aime

7

Get Out
Clairette02
8

Man, I told you not to go in that house.

Des bienfaits de ne pas trop se renseigner sur un film... Je suis allée voir Get out en pensant qu'il s'agissait d'une comédie, portant sur le racisme aux Etats-Unis. Pas sûr que le terme de...

le 1 mai 2017

99 j'aime

8

Du même critique

Moonlight
mymp
8

Va, vis et deviens

Au clair de lune, les garçons noirs paraissent bleu, et dans les nuits orange aussi, quand ils marchent ou quand ils s’embrassent. C’est de là que vient, de là que bat le cœur de Moonlight, dans le...

Par

le 18 janv. 2017

179 j'aime

3

Killers of the Flower Moon
mymp
4

Osage, ô désespoir

Un livre d’abord. Un best-seller même. Celui de David Grann (La note américaine) qui, au fil de plus de 400 pages, revient sur les assassinats de masse perpétrés contre les Indiens Osages au début...

Par

le 23 oct. 2023

163 j'aime

13

Seul sur Mars
mymp
5

Mars arnacks!

En fait, tu croyais Matt Damon perdu sur une planète inconnue au milieu d’un trou noir (Interstellar) avec Sandra Bullock qui hyperventile et lui chante des berceuses, la conne. Mais non, t’as tout...

Par

le 11 oct. 2015

161 j'aime

25