Ave Ridley Scott, ceux qui n'ont pas aimé te saluent

Il est difficile de s'attaquer dignement à un monument comme Gladiator qui a multiplié les dithyrambes du public et des critiques. Même ceux qui n'effleurent qu'en surface le cinéma ont déjà entendu parler du film. C'est un immanquable et il n'y a pas d'équivalent en son temps. Ce n'est pas faux car le péplum n'est pas un genre qui est vraiment d'actualité. Le fait que tant de gens ont aimé peut bien sûr se comprendre vu que Gladiator a des arguments à vendre mais, en ce qui me concerne, ce n'est pas passé et moi le premier ai été surpris car je ne m'attendais pas du tout à ça, surtout après une scène de bataille dans les bois d'un très beau rendu. Oui, je suis une de ces rares personnes qui n'ont pas seulement répudié le film mais ont en plus été agacés.


A mes yeux, le péplum c'est d'abord la grandeur, les moyens de mise en scène, l'ambition financière. Voyez Ben-Hur (pas le remake abject de 2016), voyez Les Dix Commandements, voyez Cléopâtre, voyez Cabiria. Ce sont des films qui en jettent, qui vous épatent par leur démesure. Ce ballet de milliers de figurants, ces décors somptueux, ces ornementations et ces costumes d'époque et enfin ces batailles filmées avec maestria. Voilà ce qu'est le péplum mais comment être émerveillé quand jamais Ridley Scott ne suit l'esprit de ses descendants. Comment un péplum peut-il impressionner quand les plans rapprochés et scènes trop mobiles se chevauchent constamment ? Presque jamais Gladiator ne s'attarde sur les merveilles architecturales de la Rome antique. Presque jamais il prête allégeance aux plans larges et panoramiques qui sont pourtant la condition sine qua non du péplum.


C'est le choix facile de la mise en scène standardisée dont le spectaculaire ne peut être attribué qu'aux codes avariés du blockbuster qui se vautre dans un traditionnel faux rythme en faisant fi également du contexte historique dans lequel il incorpore fiction et survol de son sujet. Même avec la version longue, un arrière-goût prégnant reste durablement. S'ensuivront alors la traditionnelle romance stéréotypée, des phrases toutes plus convenues les unes que les autres, des personnages qui disparaissent aussi vite qu'ils sont arrivés (l'ami noir de Maximus par exemple). Et quid des effets spéciaux qui n'arrivent jamais à la cheville des titanesques productions citées précédemment tel Ben-Hur. Ce même Ben-Hur dont la grandeur du Colisée nous écrasait alors que celui de Gladiator semble ridiculement petit. Alors que le palmarès n'était déjà pas des plus vendeurs, Ridley Scott intégrera de la dramaturgie creuse bourrée de facilités éhontées, un spitch de fin d'une femme esseulée qui transpire la mièvrerie où la bande-son insupportable atteindra son point culminant.


Si les acteurs principaux, le magistral Joaqin Phoenix en tête (qui a déjà mieux joué), nous apportent une certaine sympathie, c'est bien peu à côté de toutes les tares rencontrées. Et ça me fait mal de le dire mais oui Gladiator ne m'a pas convaincu une seule seconde. Une désillusion venant d'un cinéaste qui n'a pourtant plus rien à prouver.

MisterLynch
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le 4 mars 2021

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MisterLynch

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