Il fallait le voir pour le croire : Shyamalan s'avère être un grand metteur en scène !

L'année cinéma 2019 commence a priori très fort et ce d'autant plus qu'elle marque le grand retour d'un réalisateur dont on attendait manifestement absolument plus rien, M. Night Shyamalan...Franchement qui l'eut crut ?
Pour beaucoup de gens, Shyamalan a toujours été l'auteur de seulement deux grands films, à savoir, "Le sixième sens" ainsi que "Incassable" ; après quoi le réalisateur a vraisemblablement totalement sombré dans des délires hollywoodiens incompréhensibles voire carrément nanardesques : on peut notamment se remémorer l'abominable "Phénomènes" de 2008 ou encore "After Earth" en 2013 qui fut un échec commercial hors-norme. Avec le temps donc, les films de Shyamalan sont ainsi devenus de véritables cas d'école apparaissant comme l'exemple même de ce qu'il ne faut pas faire au cinéma lorsque l'on bénéficie d'ores et déjà du statut de grand réalisateur. En effet, après les incroyables succès commerciaux de "Incassable" et de "Le sixième sens", Hollywood a vraisemblablement bien trop vite conclut qu'elle avait ainsi affaire à un véritable génie du septième art (mais avant toute chose probablement à un véritable génie des recettes au box-office) et que de ce fait tout pouvait lui être donné et accordé sans conditions, c'est à dire aussi bien tous les fonds nécessaires que tous les acteurs imaginables ainsi que la plateforme de distribution la plus gigantesque possible. Or loin d'être de simples blockbusters totalement dépourvus d'idées, le problème avec les films de Shyamalan semble précisément résider dans le fait que ceux ci sont en réalité justement beaucoup trop remplis d'idées qui sont exprimées de façon extrêmement confuse (sur ce point précis, voir l'excellent Chroma de Karim Debbache consacré au film "Signes"). Loin de vouloir trouver des excuses à un réalisateur qui a ainsi toujours eu budget illimité pour chacun de ses films, il est peut-être cependant possible de comprendre ce problème à la lumière de l'explication suivante : Donner autant de pouvoir à un si jeune réalisateur et mettre autant de moyens à sa disposition, c'était lui offrir sur un plateau la possibilité de projeter à l'écran toutes les idées possibles et imaginables que ce dernier avait en stock et ce quand bien même il ne parviendrait pas à les structurer par le biais d'un récit et d'une mise en scène cohérente de telle sorte que ces mêmes idées prennent alors la forme de délires obsessionnels complètement dépourvus de sens. Il aura donc fallu attendre longtemps (et même très longtemps) pour que M. Night Shyamalan soit en mesure de mettre de l'ordre dans ses idées mais force est de constater qu'avec "Glass" il y est enfin parvenu !
Il ne s'agit pas là d'un long métrage qui s'avérerait simplement bien construit grâce aux procédés de narration qu'il utilise ou grâce aux multiples références qu'il convoque mais sans aucun doute (et je n'aurai vraiment jamais pensé dire ça un jour d'un film de Shyamalan croyez-moi) d'un excellent film qui place le réalisateur au rang de véritable auteur et non plus de simple faiseur. A l'instar de l'extraordinaire "Logan" de James Mangold qui parvenait à fournir un souffle nouveau au genre du film de super-héros, "Glass" en dit énormément plus que son propos ne le laisse penser au premier abord et apporte un regard complètement inédit sur ce qui constitue la genèse même du statut de super-héros. Il y a incontestablement beaucoup de choses à dire au sujet du film et des multiples interrogations qu'il suscite, ne serait-ce que dans la manière dont il questionne le rapport entre réalité et fiction ou encore dans la façon dont il reprend le thème (apparemment si cher à Shyamalan) de la peur de l'autre et de la façon dont cette même peur peut nous empêcher de voir les choses telles qu'elles sont en réalité. Sans vouloir cependant entrer dans ce débat qui aurait inévitablement pour conséquence de spoiler ceux qui n'ont pas encore vu le film, ce qui m'a pour ma part véritablement bluffer c'est avant tout la mise en scène elle-même et surtout le fait que (et ce du début à la fin) la mise en scène soit entièrement au service de l'intrigue et du propos global qui se cache derrière cette même intrigue alors que c'était quelque chose que "Split" ne parvenait à accomplir à aucun moment de mon point de vue. Loin d'être un simple exercice de style, celle-ci s'avère en tous points absolument exceptionnelle ici : Les plans sont beaux, soignés, cadrés de façon géométrique et sublimés par un jeu de couleurs très travaillé. La caméra filmant les personnages en gros plan semble ainsi littéralement les enfermer dans l'écran pour par la même mieux nous renvoyer à la manière dont ils sont enfermés dans l'asile psychiatrique. De très nombreux procédés techniques innovants nous permettent ainsi de changer constamment de point de vue, nous immergeant ainsi d'autant plus dans l'histoire ; comme par exemple le fait de ne pas montrer l'action et la violence, ou plus exactement, de montrer celles-ci de manière détournée à travers les autres écrans présents dans l'asile. Preuve que le film semble réellement nous inviter à entrer dans la fiction et non pas chercher à nous imposer celle-ci comme c'est trop souvent le cas dans les films de super-héros. A l'inverse de "Split", le film est en quelque sorte jusqu'au-boutiste dans ses intentions, aussi bien dans son intrigue que dans son parti pris esthétique mais aussi dans la manière dont les personnages eux-mêmes sont présentés et développés. Le personnage de James McAvoy par exemple, qui ne parvenait alors absolument pas à s'exprimer pleinement et à trouver une véritable consistance dans le huis-clos précédent, trouve ici une réelle cohérence au contact d'un Bruce Willis justicier et acquiert de ce fait une toute autre dimension. il en est de même pour le super-vilain Mister Glass interprété par Samuel L. Jackson qui apparaît en réalité comme le véritable héros de l'histoire parvenant à faire en sorte que la fiction devienne réalité...Croire à la fiction pour que celle-ci puisse enfin prendre vie, c'est là l'une des idées essentielles que l'on retiendra mais il fallait en tout cas voir le film pour le croire, Shyamalan s'avère être un grand metteur en scène !

VHS1
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le 19 janv. 2019

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