Un cul sur l'horreur - Un autre cul sur la comédie


Un scénario bancal :



En 1984, sans doute sous l'impulsion d'un film comme E.T. s'ouvre une nouvelle vague de films à mi-chemin entre la comédie et le film fantastique, avec des personnages un peu geek ou un peu adolescent face à un évènement surnaturel ou science-fictionnel. Chacun d'entre eux eurent leur pattes et leur thématique : le mélange film satyrique et fantôme donnera Ghostbusters, le mélange de comédie de lycéen et de voyage dans le temps donnera Retour vers le Futur (qui partage des décors avec Gremlins) et le mélange entre cartoon et film horrifique donnera Gremlins.


Du reste, je vous donnerais bien des détails sur ce projet, mais le critique Fritz_the_Cat a déjà publié sur ce site, une critique bien foutue et documentée qui résume l'origine du projet Gremlins. Toujours est-il qu'à l'origine le film devait être un film d'horreur bien plus gore et plus ironique que prévu dans lequel un adolescent, Billy, qui avait adopté une petite créature toute mignonne la voyait se transformer en monstre et se multiplier et devait l'affronter ainsi qu'une horde de créature démoniaques auquel elle avait donnée naissance.


Et on sent qu'il y a eu réécriture tant le film balance souvent entre film d'horreur et comédie cartoonesque, notamment dans sa construction : plusieurs personnages présent lors de la partie "exposition" du film sont absent dans son développement, que ce soit le chien de Billy ou son pote ou la grand mère acariâtre dont on s'attendait qu'elle prenne plus de place. De plus certaines scènes semblent arriver comme un cheveux sur la soupe, comme cette scène grinçante où la copine de Billy explique pourquoi elle déteste Noël alors que leur ville semble avoir été mise à feu et à sang par les bestioles. (Scène dont Joe Dante avait insisté pour qu'elle reste afin de garder le ton de "comédie noire" au film.)


Pourtant, le film fonctionne, notamment grâce à l'animatronique et aux marionnettes de Gizmo et des différents Gremlins qui sont parfaites (surtout quand le dernier film que j'ai vu était déjà une ode à la marionnette...) : Le premier ayant un côté "peluche/mascotte kawaïii" tandis que les autres ont un côté "cartoon noir" totalement délirant. Les animateurs s'en donnent à coeur joie à mettre en oeuvre ces créatures qui saccagent une ville de la façon la plus fun possible.


Du coup les passages d'un genre à un autre sont d'autant bien foutu que Joe Dante est doué pour les deux : les passages sous forme de film d'angoisse sont vraiment stressant (comme ces scènes au lycée ou dans la maison de Billy ou la menace n'est pas visible, la bataille finale contre le gremlin-à-crète, etc...) et les passages comiques sont vraiment jouissif (les Gremlins au bar, les Gremlins au cinéma, les Gremlins qui sabotent un fauteuil de mémé mais aussi le salon des inventeurs, etc....) Le film peut limite résumé à cette scène où Billy et sa copine sortent de leur voiture. A l'intérieur, on ne voit rien et l'angoisse est palpable et lorsqu'ils ouvrent la porte, ils se retrouvent au coeur d'une ville en proie aux Gremlins qui font des conneries dans tous les sens.



Les gremlins, vecteur du quotidien :



Une des particularité du film est de ne pas se reposer sur une vieille légende ou sur un monstre folklorique mais de remettre au goût du jour une légende ayant trainé auprès des aviateurs de la seconde guerre mondiale.


Et le film semble s'amuser à sous-entendre que le petit monde dans lequel Billy se trouve est DÉJÀ détraqué avant l'arrivé des gremlins (qui ne font que remuer la merde qui était déjà là...) : les codes absurdes de l'entreprise (thématique qui sera étendue dans le deuxième film) les machines qui se déglinguent à cause de matériel de piètre qualité (permettant d'introduire un vétéran de la seconde guerre mondiale donnant le nom du film) décorations sur le mur qui se cassent la gueule quand on ouvre la porte et surtout les machines du père de Billy, censée fonctionner mais se révélant toutes plus catastrophiques les unes que les autres.


Au passage, c'est l'un des rares films où les personnes qui entourent le héros ont plus de background que lui : le père de Billy est un inventeur foldingue, sa copine a une histoire assez triste avec les noël, mais Billy n'a pas des masses de caractérisation et se trouve être le "bon garçon de base" : blanc, gentil, de classe moyenne, ni particulièrement trouillard ni particulièrement téméraire. Tout ce qu'on sait de lui, c'est qu'il sait dessiner. Du coup, certains rejettent cette faute sur son acteur, Zach Galligan, alors que personnellement j'y vois plutôt une envie de Joe Dante d'en faire un vaisseau vide afin d'en faire une projection du spectateur (le film s'adressant aux ados et aux jeunes adultes) preuve en est qu'il a rejeté la candidature d'acteurs au caractère plus "marqué."


Le film s'autorise aussi à la toute fin une morale "verte" avec un chinois déplorant à quel point la société occidentale à pollué et détruit les cadeaux que la nature lui à fait. Bon, 30 ans plus tard, quand on voit l'état de la Chine, on se dit que le film peut remballer ses leçons à la mord-moi-le...



Hommage jouissif :



Encore un point qui est appuyé )aussi dans le numéro 2 (qui dans mon souvenir était meilleur que le premier) c'est l'hommage au monde du cinéma et de la SF dont le film semble faire preuve : clins d'oeil, caméos (Chuck Jones dans un bar...) gags d'arrière plan (la machine à remonter le temps qui s'emballe) et apparition d'extraits divers que ce soit Blanche Neige et les 7 Nains ou l'ensemble des films apparaissant sur la télévision.


Joe Dante est un amoureux du cinéma de genre et les gremlins en sont le reflet, parodiant aussi bien les films d'horreur (tronçonneuse) ou le film noir (la scène dans le bar.) Mais aussi par le nombre et la diversités des trucages dans le film : on passe aussi bien de la marionnette traditionnelle, qu'a l'animatronique, qu'au stop motion à la Ray Harryhausen. Et mine de rien, le trucage "fait main" fait une grande partie du charme de ce film... et des films fantastiques du début des années 1980.


Il est amusant de voir qu'au final, si les gens retiennent du film la partie "comédie" et l'aspect "mignon" (sans doute à cause de la suite et à cause de Gizmo) le monde du cinéma retiendra la partie "horreur." En effet, Gremlins sera la base d'un genre horrifique à lui tout seul, mettant en scène des ados face à des créatures dégueulasses et démoniaques tueuses. On peut ainsi citer Critters (même si déjà en chantier à l'époque) et des merdes comme Ghoulies , Hobgoblins ou la série des Leprechaun (bon ça s'inspire de Chucky en bonne partie aussi et je m'égare...)


Cette critique ne saurait être complète sans une critique du deuxième film qui arrivera d'ici peu.

le-mad-dog
7
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le 9 août 2016

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Mad Dog

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