On avait bien compris, dès ses premiers films, que Ben Wheatley était un drôle d'oiseau, à l'instar de son compatriote Peter Greenaway. Son adaptation d'un roman culte de Ballard pouvait donner le meilleur comme le pire, eu égard à son tempérament peu conformiste. Disons que High-Rise se situe entre les deux, avec une vision rétrofuturiste plutôt séduisante, dans un style décadent très marqué, mais qui a tendance à partir en vrille à partir du milieu du film, avec de purs moments de délire parfois gratuits car conçus uniquement pour provoquer ou montrer son statut d'auteur à part entière. Cette tour infernale, avec lutte des classes intégrée, est d'une lecture limpide, sur un plan intellectuel, mais Wheatley semble s'en désintéresser peu à peu, privilégiant l'image, surtout si elle est incongrue, au discours. Il y a de bons moments malgré tout, grâce à l'excellence de l'interprétation (Tom Hiddleston, Jeremy Irons, Sienna Miller, Luke Evans) et à la partition musicale (la "cover" d'un titre d'Abba par Portishead est bluffante). Entre visions fulgurantes et excès de situations extrêmes, Ben Wheatley conforte sa position d'alien du cinéma. Ce qui est sans doute le but recherché.