Once upon a time in America ou A la recherche des souvenirs perdus...
C'est l'histoire d'une amitié entre deux hommes, d'une relation à long terme pleine de belles promesses, d'honneur et de loyauté, d'une relation ponctuellement perturbée par les femmes et l'avidité du pouvoir ; d'une amitié solide et persuasive rassemblant cinq petites frappes autour d'un pacte et d'une mallette de leur prime jeunesse dans les années 1920 jusqu'à l'enterrement de la Prohibition une dizaine d'années plus tard. L'histoire de Noodles, gangster purgeant à deux reprises une peine carcérale : d'une part pour avoir vengé la mort du benjamin de la bande à coups de canon, derrière de vrais barreaux ; d'autre part pour avoir balancé son meilleur ami et provoqué indirectement sa mort, pour une durée de 35 années d'exil et de solitude. L'histoire de Max et de son rêve, du pognon facile et des accords avec la Haute Pègre... L'histoire d'une blessure trimballée loin des rues du Lower East Side sous couvert de culpabilité. L'histoire d'Amour entre Noodles et Deborah, entre le rustre voyou et la grâce spectaculaire, entre l'étoile et le ver de terre. L'histoire enfin - et surtout - d'un gigantesque gâchis moral, d'un monceau de souvenirs passés à la moulinette d'une terrible, d'une désastreuse, d'une extraordinaire trahison.
Il aura fallu quinze ans à Sergio Leone pour accoucher de ce véritable chef d'oeuvre du Septième Art techniquement irréprochable et d'une émotion, d'une tristesse et d'une amertume rarement égalées dans le genre. S'étalant sur plus d'une quarantaine d'années le récit de cette saga désenchantée témoigne d'une unité indiscutable, doué d'une complexité narrative à la fois limpide et audacieuse. La direction artistique, le casting, la composition inoubliable d'Ennio Morricone ou encore le montage virtuose font de Once upon a time in America l'un des plus grands films de gangsters de tous les temps ; Robert De Niro et James Woods forment un duo pratiquement sensationnel, le premier davantage sobre et introspectif, le second principalement imprévisible voire exubérant. Jennifer Connelly, dans son premier rôle à l'écran, brille quant à elle d'une belle cinégénie...
Sergio Leone signe sans doute là son plus grand film, au gré d'un montage multipliant les sauts dans le temps et d'audaces sonores très intelligemment incorporées au métrage. L'évidence de la fluidité du rythme et de l'agencement général se voit doublée d'une charge émotionnelle que l'on doit beaucoup à Morricone, véritable assistant-réalisateur de Leone faisant jouer son orchestre comme un personnage à part entière. Il s'agit d'un film inoubliable, passionnant à suivre et à regarder dans le même temps. Une fresque "bigger than life" à voir absolument dans sa version de quatre heures !