Dix-huit heures quinze de la vie d'une trentaine de personnages sur fond d'influence lunaire et de passage à l'heure d'été. Synchronicité et destinée sont à nouveau les deux mots d'ordre de ce trente et unième long métrage réalisé par le passionnel et passionné Claude Lelouch. Dans ces jours et ces lunes on trouve un peu de tout, de n'importe quoi et de son contraire : Vincent, Francis, Paul et les autres surjouent une improbable mascarade reposant sur les superstitions et les lubies du cinéaste, nous ressassant une tambouille visuelle et musicale à la fois fâcheusement naïve et joliment attendrissante.


Retenons pêle-mêle dans ce concert faramineux, plombant et proche de l'immense paradoxe : Francis Huster plus mauvais que jamais en pieuse gravure de mode, un pianiste jouant une musique passe-partout sur un clavier invisible, Patrick Chesnais en chirurgien antipathique, Lindon en joueur invétéré, Marie-Sophie et Salomé L.elouch parce qu'il faut bien complaire à la famille, Philippe Léotard superbe en chanteur jouant l'amour en auto-reverse ( musique au top ), Patrick Bruel, une théorie de Paul Préboist sur les humeurs aqueuses du cratère nocturne proche de l'élucubration, beaucoup beaucoup beaucoup de travellings circulaires parce que c'est flamboyant, Charles Gérard en papy ronchon ( on ne change pas une équipe qui gagne ), Annie Girardot impeccable, une introduction inutile mais programmatique ( fête vos jeux ) avec des envolées lyriques par-delà le Mont Saint-Michel sur fond d'arrangements musicaux digne des grandes heures de Michel Sardou, et surtout, surtout, surtout, surtout Gérard Lanvin sublime en camionneur sous le coup de l'emmerdement maximum.


Bref c'est à la fois très bon et très mauvais, filmé à l'emporte-pièce et criblé d'idées reçues, c'est passionnant à regarder même dans ses moments les plus grotesques et les plus sur-montrés. Gamblin joue bien mais ne sert à rien. La 46ème minute du métrage m'a fait sourire et la 57ème m'a fait gentiment ronger mon frein. Il y a de l'amour, presque pas de sexe ( bon y a une femme enceinte, mais ça compte pas ), des accidents de voiture, des crimes, des châtiments, une putain d'énergie vitale transformant le navet en nanar ultra-poilant, Salomé qui fait ses premiers pas de comédienne, papa qui présente sa fable délibérément crédule ( mise en abyme, de fait : c'est du cinéma ). Il y a Patrick Bruel. Un homme et une femme revisité, un peu de sang, beaucoup de sentiments et de super-glu. Parfois on ne comprend rien, mais c'est normal : il y a des jours et des lunes. Point.


Nan sérieusement je me suis bien marré devant cette énigme inénarrable et nébuleuse comme le dernier Palantir de la sorcière du placard à balai. Il y a de belles images et de la musique. Il y a de l'amour et de l'eau fraîche à en faire passer le goût du boire. Et il y a Patrick Bruel. Et Vincent Lindon. Et Salomé. Grosse qualité. Et poids lourd du cinéma français.

stebbins
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le 25 avr. 2020

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