De la grandeur, il y en a certainement dans ce Interstellar. Dans pratiquement tous les plans. Nolan a véritablement un sens inouï du visuel qui entraîne des représentations inédites et dantesques des trous de ver, parmi d'autres plans spatiaux époustouflants dans la veine de Gravity, ou encore Sunshine. Il y a aussi ces paysages extraterrestres hostiles à la beauté toute cinématographique, dont certains renvoient même à son Insomnia. Le tout profite évidemment de la splendeur incomparable du format IMAX, immersif au possible. Et Hans Zimmer, à la composition, qui élève pratiquement chaque image de la pellicule avec des sonorités évangéliques d'orgue pour évoquer l'effroi et la magnificence, ainsi que quelques partitions Classique ; un travail musical formidable, qui sait toucher, sans toutefois transcender, ni réinventer, et parfois même trop en avant. La grandeur se capte également dans la flopée d'émotions qui façonnent le long-métrage. Pratiquement tous les acteurs ont leur moment de grâce, même si McConaughey a évidemment la primeur de la charge dramatique. Cependant, à l'instar de The Dark Knight Rises, beaucoup de dialogues sonnent trop académiques et pointilleux dans le choix des mots.

Derrière son ambiance intimiste initiale à la Signes, on sent bien que Nolan cherche avant tout à réaliser le 2001, L'Odyssée de L'Espace du 21è siècle. Seulement, là où un tout petit film indépendant tel que Beyond The Black Rainbow parvenait à égaler le monolithe de Kubrick dans l'esprit, Interstellar ne parvient qu'à offrir l'expérience visuelle déstabilisante, en dépit de paraître un peu plus profond. Contrairement à ce que nous avait habitué le réalisateur, il veut vraiment tout rationaliser, expliquer et conclure, sans laisser une once de mystère, ni de fascination, qui aurait pu résulter en réflexions métaphysiques, ou autres interprétations poussées, de la part du spectateur. Du coup, Interstellar parle vraiment trop dans l'émerveillement. Car, si Nolan a imbriqué toute la SF spatiale qu'il adorait dans sa nouvelle œuvre, il se retrouve avec moult thématiques et scénarios qui auraient pu amener autant de film différents et cohérents. À l'inverse, il surcharge ses idées prometteuses de jargon scientifique pour finalement les conclure dans la facilité. Sans parler des quelques invraisemblances, dont une révélation trop prévisible - on s'attendait alors à un traitement grandiose - qui mine le climax, le rapprochant d'un Cube 2: Hypercube, ou autre téléfilm de SyFy.

En fin de compte, aussi sensationnelle et éprouvante que soit cette aventure spatiale, on trouve de nombreux (petits) films qui parvenaient à bien mieux exploiter les mêmes thèmes, dans leur propre beauté fébrile et poétique, et avec davantage d'esprit. Malgré ces critiques, Interstellar demeure un grand moment de cinéma, empli d'instants de grâce, mais loin du chef-d’œuvre espéré de Christopher Nolan, que l'on connaissait bien plus subtil et minutieux.

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le 6 nov. 2014

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AntoineRA

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