C'est un Christopher Nolan davantage porté sur l'humain que l'on retrouve dans Interstellar. L'histoire d'une famille, de la relation d'un père avec sa fille et, plus largement, d'un homme avec l'humanité, rien que ça. Un film sur la renaissance -celle de l'homme- qui entame celle du blockbuster.
En 2001 une onde radioélectrique amenait une équipe d'astronaute tout droit vers Jupiter, à la rencontre d'êtres supérieurs supposés nous révéler le sens de la vie. En 2040, 2050 -un futur plus ou moins proche- d'autres êtres nous guident vers une nouvelle planète habitable pour continuer à donner sens à notre existence, en la sauvant. Les héros de ces deux films similaires ne font que refléter la tâche de leurs auteurs respectifs. En révélant tous les possibles d'un art qui pensait déjà avoir fait le tour, Kubrick redonne sens au cinéma. Tandis que Nolan tente de sauver un genre réduit à un pur produit de consommation. De la même manière que Cooper, Christopher Nolan semble être venu chercher ses ancêtres cinématographiques pour sauver ce qu'il reste à sauver : le blockbuster qui, depuis les années 80, décline irrémédiablement. Cent ans après les derniers films de Mélies, Christopher Nolan revient à ce qu'il considère être l'essence du cinéma. Il gomme tout, et il recommence. Fini le superflu, adieu la 3D et dehors les effets numériques polluants l'image. Le réalisateur britannique fait la nique à Hollywood en revenant au 35mm et à la bricole des effets spéciaux mécaniques. Le résultat est remarquable. Les orgues de Hans Zimmer valent bien plus que n'importe quelle surcharge visuelle, Nolan a tout compris.
En refusant tout spectaculaire gratuit, Nolan atteint une vérité inégalée dans le blockbuster, a fortiori dans la science-fiction. Prétendument irréprochable sur le plan scientifique, Interstellar n'hésite pas à prendre le risque de perdre son spectateur en parlant de trous noirs. Mais mine de rien, même si on ne comprend pas tout, on y croit. Le film réussit à nous faire oublier le spectacle pour nous projeter dans un futur que Nolan met un soin fou à rendre crédible. Ici ce ne sont pas les décors qui sont cachés par les effets spéciaux, mais une vague géante ou un monde de glace qui camoufle tout effet numérique polluant, pour plus de réalisme. Quand bien même l'histoire qui nous est conté est extraordinaire. Interstellar et le satellite tout juste posé Rosetta sont là pour nous rappeler qu'il ne s'agit plus que de science-fiction.
Révolution au sein du blockbuster. Christopher Nolan nous rappelle que le réalisme vient de la caméra, de ses plans et du hors-champs, et non d'un ordinateur.