Le sujet est on ne peut plus iconoclaste - doux euphémisme. Il traite des amours adolescentes, avec ce que d'aucuns appelleront un brin de complaisance. Pour ma part j'avoue que certaines scènes m'ont semblé composées avec en effet quelque empressement à filmer le nu et le désir adolescent.

Mais il est vrai que le scénario et le réalisateur s'évertuent par ailleurs à ne pas glisser dans le graveleux, à évoquer le flou entre désir et amour, amitié et sensation, affection et démonstration des sentiments, ce flou perturbant que les adolescents découvrent comme malgré eux, sans comprendre, avec angoisse et démesure. Cela est très bien montré dans ce film.

Les personnages sont complexes. Les symboles apparaissent de manière un peu trop forcée (le serpent, les rêves, les ténèbres du château, etc.)

La complaisance, s'il y en a, vient de cette résolution à tracer le parcours émotionnel et sensuel de ces ados dans un cadre quelque peu déviant.
D'abord on a un garçon, Fabrizio, sans histoire bien évidente, qui règne sur un monde naturel, son berger allemand, son environnement, qui connait les coins et recoins de sa forêt, et qui n'aspire qu'à une chose gravir cette impressionnante montagne qu'il ne connait pas encore.
C'est l'été, une jeune fille en vacance, Laura, un peu plus jeune que lui se lie d'abord d'amitié avec Fabrizio mais très vite elle noue des liens encore difficiles à exprimer, quelque chose entre l'attirance et la répulsion. Car le bel ami Fabrizio s'ingénie à lui pourrir la vie, à titiller ses peurs infantiles, ses faiblesses. Il prend un malin et cruel plaisir à la brutaliser moralement. Elle tombe paradoxalement amoureuse, malgré elle. Peut-être à cause de cela?

Dans ce duo déjà conflictuel, vient s'ajouter une tierce personne, Silvia, une jeune fille aussi cruelle et perverse que Fabrizio. Les deux s'associent évidemment pour inventer toutes sortes de supplices à la pauvre et masochiste Laura. Des sentiments morbides viennent progressivement éreinter les sentiments amoureux et rendent leur interprétation encore plus énigmatique pour les trois concernés. Fabrizio se perd lui aussi dans un amour de plus en plus envahissant et dérangeant pour Silvia.

Si ces nombreux malentendus de l'adolescence, entre le passé enfantin et le futur effrayant de l'âge adulte, sont assez bien dépeints, on est un peu malheureusement déçu par les déviances trop romancées des relations. Trop romancées? J'exagère à peine. Il est vrai que ce genre d'évolution perverse arrive parfois.
Ces ados sont ici totalement livrés à eux même. Pas un adulte à l'horizon. Cela peut expliquer la souffrance de leur désarroi. Cependant, la cruauté originelle est dès le départ un élément du tableau général. On rejoint là le sentiment que les auteurs ont privilégié un parti-pris quelque peu complaisant, pour livrer un spectacle structuré sur un récit à suspense un peu trop évident.

Reste de bien belles images parfois. La nature est belle. Certains plans sont magnifiques. La musique, malgré sa trame classique, se marie parfaitement avec le décor enchanteur.

Au final un joli film, qui pose de bonnes questions mais qui ne me satisfait pas totalement avec des réponses un peu trop banales et faciles. Et l'on ne peut pas échapper à un trouble, quelque chose de gênant, le fait qu'on ait pu faire un film quasi érotique avec de si jeunes gens.
Alligator
5
Écrit par

Créée

le 31 janv. 2013

Critique lue 1.5K fois

2 j'aime

Alligator

Écrit par

Critique lue 1.5K fois

2

D'autres avis sur Jeux interdits de l'adolescence

Jeux interdits de l'adolescence
sharghan
4

Critique de Jeux interdits de l'adolescence par sharghan

Il se trouve que je parcours ces derniers temps quelques films connus pour être borderline ou avoir fait leur petit scandale. Je suis donc tombé sur Maladolescenza en VO italienne sous-titrée...

le 14 août 2017

2 j'aime

Jeux interdits de l'adolescence
Alligator
5

Critique de Jeux interdits de l'adolescence par Alligator

Le sujet est on ne peut plus iconoclaste - doux euphémisme. Il traite des amours adolescentes, avec ce que d'aucuns appelleront un brin de complaisance. Pour ma part j'avoue que certaines scènes...

le 31 janv. 2013

2 j'aime

Du même critique

The Handmaid's Tale : La Servante écarlate
Alligator
5

Critique de The Handmaid's Tale : La Servante écarlate par Alligator

Très excité par le sujet et intrigué par le succès aux Emmy Awards, j’avais hâte de découvrir cette série. Malheureusement, je suis très déçu par la mise en scène et par la scénarisation. Assez...

le 22 nov. 2017

54 j'aime

16

Holy Motors
Alligator
3

Critique de Holy Motors par Alligator

août 2012: "Holly motors fuck!", ai-je envie de dire en sortant de la salle. Curieux : quand j'en suis sorti j'ai trouvé la rue dans la pénombre, sans un seul lampadaire réconfortant, un peu comme...

le 20 avr. 2013

53 j'aime

16

Sharp Objects
Alligator
9

Critique de Sharp Objects par Alligator

En règle générale, les œuvres se nourrissant ou bâtissant toute leur démonstration sur le pathos, l’enlisement, la plainte gémissante des protagonistes me les brisent menues. Il faut un sacré talent...

le 4 sept. 2018

50 j'aime