Où est donc passée la flatterie enthousiasmante qui nous avait scotché tant bien que mal devant le premier Jurassic World ? L'étincelle fébrile qui le faisait se démarquer de toute cette flopée de remakes insipides des bases de notre jeunesse. On passe de la bonne surprise à la déception avec cette filiation superficielle, réalisée par un grand du cinéma espagnol. Tout au long du film, on perçoit quand même assez de retenue de la patte Bayona qui s’emmêle les bobines.
Le spectacle n'en reste pas moins un peu divertissant et le personnage du Docteur Ian Malcolm, impliqué en deçà des précédents volets, aurait mérité une place en première classe dans cette sinistre mésaventure. Il se contente ici de participer impuissant à la conférence sur le sort de nos chers amis préhistoriques, étalant une fois encore ses faits inéluctables sur les conséquences de telles décisions.
À la place de l'emblématique chaoticien interprété par Jeff Goldblum, le casting est un chouia poussif avec Zia, une paléo-vétérinaire emo badass, et Franklin, un informaticien jouvenceau qui fait pipi dans sa culotte dès qu'un moustique l'approche de trop près. Puis la clique de mercenaires, un copié-collé du film de 1997, avec comme meneur une parodie de Roland, le chasseur de T-rex. Le duo sarcastique Claire/Owen, reste toujours plaisant à voir.
Avec le recul, pas grand chose nous reste en mémoire, une éruption volcanique spectaculaire anéantissant l'île pour aboutir à une vente aux enchères des quelques espèces sauvées dans l'Arche d'InGen. La suite cohérente du travail d'Hammond, corrompu par le business. Quelques scènes flippantes ça et là retiennent notre souffle mais une meilleure uniformité était accueillie à bras ouverts. Avec toutes les cartes en mains, difficile de se planter et pourtant...
Le nouvel hybride, labellisé Indoraptor, nous est présenté comme plus intelligent, plus rapide, plus agressif que son petit frère l'Indominus Rex qui lui lègue son ADN. Au final on se rend compte que ces deux monstres sanguinaires, souffrants d'une déficience d'eau et de gaz à tous les étages, se font voler la vedette par Blue, le raptor dressé par Owen.
À aucun moment nos protagonistes sont en danger face à l'abomination, tantôt plantant sa griffe dans la jambe plantureuse de notre héroïne Claire coincée sous des décombres tantôt piégeant notre voleur et arracheur de dents, trop arrogant. Dans les autres situations, ce croisement génétique semble avoir du mal à se mouvoir face à de simples humains, ridicule !
Quand nos héros laissent s'éteindre les derniers survivants du cataclysme, cloîtrés et asphyxiés par un gaz mortel, je commençais à me dire, la tête un poil nihiliste et quelque peu modeste, "quel final !". Un final qui aurait mérité toute mon attention et mon approbation accompagnées d'une émotion palpable si ce génocide en était resté là.
Mais qui dit suite, dit personnage qui pète les plombs et fait n'importe quoi, libérant nos mastodontes agonisants en pleine nature, livrés à eux-mêmes dans notre civilisation. C'était le rêve d'un savant fou se prenant pour Dieu, laisser ces géants créer leur propre écosystème, loin des hommes. Ne ternissons pas d'avantage l'oeuvre de Crichton, merci.
À l'heure où je rédige cette critique, des dizaines de dinosaures sont en train d'envahir notre planète. Une cohabitation sera-t-elle envisageable entre nos deux espèces dans le prochain (et dernier?) film ? Sinon l'une triomphera de l'autre. Une idée très intrigante à suivre avec Colin Trevorrow qui reprendra les rênes. Prometteur ou nouvel échec potentiel ? Rendez-vous en 2021.