Musique!


Matthew Vaughn est un cinéaste particulier; son style visuel est déjà reconnaissable parmi mille, alors qu'il n'a même pas fait dix films. D'habitude opposé aux suites, le franc succès critique et commercial de Kingsman : Services Secrets l'a sans doute décidé à franchir le pas.


Le premier opus de la future trilogie avait surpris là où ne s'y attendait pas : très référencé, à la fois sérieux et complètement décalé, jouissif et spectaculaire. Vaughn avait une nouvelle fois frappé le cinéma, martelant son style dans le film d'espionnage, mettant à bas les navets actuels (Taken, Gunman). Voir Vaughn reprendre la caméra pour une suite avait de quoi devenir extatique. Le retour de Colin Firth aussi, un atout de plus pour un métrage qui s'annonçait clairement épique.


Pourtant, la déception est là, et il s'avère qu'elle est un peu difficile à cacher. Kingsman : Le Cercle d'Or essaie de faire plus fort, plus impressionnant que le premier. Vaughn fait la parodie du premier film; une parodie d'une parodie en soit. Ca aurait pu marcher si le metteur en scène avait réussi à ne pas enlever toute émotion au récit, qui se retrouve par conséquent un peu dénué d'âme, où les séquences d'action s'enchaînent sans pour autant s'attarder sur les événements dramatiques. Et c'est assez inquiétant, puisque cela reflète la mode actuelle hollywoodienne des blockbusters de ne plus servir aux gens que des produits formatés, lobotomisés et simplement divertissants. Bien heureusement, Vaughn est loin d'être le dernier des clampins et il se moque justement d'Hollywood avec son film et sa suite survitaminée. Mais le film perd quand même de son potentiel à trop vouloir être "cool", à trop être de second degré.


Toutefois, on pourra se consoler sur la mise en scène, complètement ahurissante et qui prouve une nouvelle fois que le réalisateur de Kick -Ass en a encore dans son pantalon. Les séquence d'action vont à 1000 à l'heure sans que ça ne soit illisible. A l'opposé des récents blockbusters, Kingsman : Le Cercle d'Or brille clairement par sa réalisation et par son esthétique resplendissante, poussant même vers le gore et le vulgaire (bien plus que le premier opus, qui osait déjà pas mal de choses). Difficile de ne pas être dithyrambique au vu de la direction globale du métrage, et en ce point Vaughn ne déçoit pas (ce qui n'est pas surprenant). Le réalisateur a une maîtrise de la caméra hors norme et il l'utilise à merveille, ses scènes d'action mettant par terre toutes celles des récents blockbusters. C'est d'ailleurs ça qui est intéressant avec le réalisateur, cette manière qu'il a de revisiter son premier film, à l'image de la reprise américaine de la célèbre scène du premier film (présente deux fois déjà). On remarque qu'il en va de même pour Henry Jackman qui compose une nouvelle fois pour Vaughn. Si Jackman pourrait être traité de paresseux tant il passe son temps à reprendre ses thèmes de films en films, ici il est un peu plus inspiré et s'en donne à coeur joie en étoffant les thèmes du premier film et en proposant quelques morceaux vraiment bons (notamment celui de Poppy). Toutefois, la bande originale plaît vraiment surtout au niveau des musiques choisies, surtout du style country pour surfer sur la vague américaine du film. Et c'est en soit particulièrement réussi, notamment avec la reprise magnifique de "Country Road" lors de la scène la plus émouvante du film.
C'est en soit ce qui caractérise les films de Vaughn maintenant : une esthétique léchée, une mise en scène folle furieuse (plans séquence, couleurs éclatantes), une BO entraînante et un rythme hyper soutenu.


Là où le métrage pêche vraiment, c'est dans son scénario; et par conséquent un peu dans ses personnages. Le retour d'anciens visages et la découverte de nouveaux viennent trop vite, il n'y aucune attache émotionnelle et de ce fait une absence presque totale d'enjeux. Les événements s'enchaînent trop facilement, et le spectateur se fait emmener de force. On n'est pas encore au stade désolant d'Alien : Covenant où les personnages réfléchissent pour le spectateur qu'on prend pour un idiot, mais Kingsman : Le Cercle d'Or ne fait pas non plus dans le subtil. En fait, Vaughn a carrément pris le parti de faire quelque chose de plus gras : dans un premier temps parce que le film se veut plus vulgaire et plus outrancier, et dans un second temps parce que tout est too much (ce qui n'est pas forcément déplaisant toutefois, à l'image du rôle abracadabrantesque d'Elton John). Mais cette vulgarité s'accompagne d'une accumulation plus gênante de clichés qui, s'ils faisaient partie du charme du premier opus, font un peu tâches au film.
De même pour les personnages, à l'exception d'Eggsy, de Harry et de Merlin, tous les autres s'avèrent être assez secondaires et remplaçables. Malgré quelques moments de gloire, les Statesmen s'effacent devant leurs comparses britanniques et là où Samuel L. Jackson transpirait la classe dans le premier opus, Julianne Moore peine à l'égaler en surjouant constamment.
Le récit est quant à lui plus tourné vers l'humour que le premier opus de la saga. Ainsi, chaque scène d'action se veut plus détendu, de manière à tourner ça constamment en dérision, ce qui hélas ne marche pas toujours. Mention spéciale à Colin Firth et à ses papillons toutefois.


De la séquence d'introduction à la scène finale, Kingsman : Le Cercle d'Or divertit spectaculairement bien. Sa réalisation et ses scènes absurdes n'ont rien à envier au premier opus et imposent Matthew Vaughn dans les réalisateurs les plus talentueux de cette décennie. En revanche, le métrage illustre la règle maudite du second opus: "on prend les mêmes et on recommence en plus gros". Plus vulgaire, plus explosif, plus tourné vers l'action... D'un point de vue scénaristique, le film peine trop pour s'en sortir indemne et c'est dommage. Malgré quelques scènes fortes, l'ensemble reste tout de même assez plat et sans surprises, à l'inverse du premier opus. Le troisième opus sera mieux, à ne pas en douter.

Marvellous

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