Oui, oui, le mot est rude.
Mais ce film est, non seulement immensément, que dis-je, incommensurablement chiant (pardonnez-moi), mais aussi plat et vide.
4, parce que je suis quelqu'un de généreux, et que si le début est un désastre, la suite remonte un peu le niveau - et qu'au niveau de l'histoire en tant que telle, il n'y a pas de trahison majeure, voire pas de trahison du tout.

La trahison est ailleurs. Kaufman dépouille l'oeuvre de ce qui en fait la majesté - on ne conserve que l'histoire d'amour et le reste passe aux oubliettes. Des réflexions, des méditations, de la psychologie un peu fouillée ? Que nenni, rendons ces pures virtualités totalement creuses pour montrer le néant kundérien ! Vous me direz, il est difficile d'adapter ce genre de choses - comment inclure une méditation sur l'éternel retour nietzschéen dans un film sans ajouter de bêtes voix off simplistes ? Eh bien, on ne fait pas de film. Mais ce n'est pas tout ! Le pire, le problème de fond selon moi, est l'absence totale de second degré dans ce film. Tandis que le roman de Kundera est construit sur l'ironie, ce film en est absolument dénué, et rend le tout... niais. Il faut le dire, ce film est niais. L'oeuvre de Kundera ne l'est pas, parce que si elle aborde des thèmes existentiels à travers des personnages parfois d'une tendresse béate, il y a pourtant dans ces personnages une réflexion intellectuelle approfondie et une ironie douce omniprésente, un recul et une proximité tout à la fois, bref de la complexité.
Ainsi, Tereza est une caricature, une idiote résumée à son apparence - Tomas un beau-parleur qui a toujours ce regard de tombeur indigent et nauséabond - seule Sabina s'en sort, il me semble, peut-être grâce à une esquisse (oh, infime) de réflexion. Ne parlons pas de Franz, on le voit à peine. Bien entendu, nulle trace de la dialectique structurant l'être des personnages, des grands axes tels que le kitsch (non, le mot prononcé au début du film ne compte pas), le temps, le vertige...

Pour faire simple, je crois qu'on peut dire que le film a réussi à ôter toute la substance, toute la quintessence de l'oeuvre originale.
Il y a des choses drôles, de temps en temps... Mais malheureusement plus en mal qu'en bien, avec notamment Tereza qui est ridiculisée. Ca manque cruellement de recul et d'explications.

Je vais mettre 3 finalement, je ne vois pas comment mettre plus.

Ah et la coiffure de Tereza est un cauchemar. Pourquoi vouloir à tout prix la faire passer pour une fille mal fagotée et un peu paumée ? Ce n'est pas l'image que j'ai de cette femme fragile, grave, douce-amère, tragique, tendre et déchirée entre le corporel et le spirituel.

Créée

le 29 juil. 2013

Critique lue 1.9K fois

16 j'aime

2 commentaires

Eggdoll

Écrit par

Critique lue 1.9K fois

16
2

D'autres avis sur L'Insoutenable Légèreté de l'être

L'Insoutenable Légèreté de l'être
Eggdoll
3

Une trahison

Oui, oui, le mot est rude. Mais ce film est, non seulement immensément, que dis-je, incommensurablement chiant (pardonnez-moi), mais aussi plat et vide. 4, parce que je suis quelqu'un de généreux,...

le 29 juil. 2013

16 j'aime

2

L'Insoutenable Légèreté de l'être
Boubakar
7

L'amour tchèque sans provisions.

Tiré d'un roman éponyme de Milan Kundera (qui ne s'est pas exprimé sur l'adaptation), le film raconte une histoire d'amour passionnelle sur fond de Printemps de Prague. Nous avons un médecin, incarné...

le 3 mars 2021

9 j'aime

3

Du même critique

L'Insoutenable Légèreté de l'être
Eggdoll
10

Apologie de Kundera

On a reproché ici même à Kundera de se complaire dans la méta-textualité, de débiter des truismes à la pelle, de faire de la philosophie de comptoir, de ne pas savoir se situer entre littérature et...

le 11 mars 2013

152 j'aime

10

Salò ou les 120 journées de Sodome
Eggdoll
8

Au-delà de la dénonciation : un film à prendre pour ce qu'il est.

Les critiques que j'ai pu lire de Salo présentent surtout le film comme une dénonciation du fascisme, une transposition de Sade brillante, dans un contexte inattendu. Evidemment il y a de ça. Mais ce...

le 6 mai 2012

70 j'aime

7

Les Jeunes Filles
Eggdoll
9

Un livre haïssable

Et je m'étonne que cela ait été si peu souligné. Haïssable, détestable, affreux. Allons, c'est facile à voir. C'est flagrant. Ça m'a crevé les yeux et le cœur. Montherlant est un (pardonnez-moi le...

le 21 mars 2017

49 j'aime

5