Risque de spoils : oui, beaucoup même. J'informe à partir de quand je spoile, n'ayez crainte.


Del Toro, je l'aime beaucoup beaucoup beaucoup. Le voir en producteur, ça attise ma curiosité. Du coup, pourquoi ne pas se laisser tenter par ce cher El Orfanato (l'oprheplinat quoi) ? Et puis, au-delà d'un très bon producteur, Juan Antonio Bayona nous a déjà pondu, quelques années plus tard, The Impossible, un joli film à chialer.
L'Orphelinat avait tout pour m'attirer, bon réalisateur, bon producteur, malgré des acteurs inconnus pour moi. Et, selon la bande-annonce, il promettait un petit esprit un peu fils de pute se cachant sous un espèce de costume d'épouvantail (je hais les épouvantails).
Mais me voilà devant l'Orphelinat. Alors, il donne quoi ?



Point de vue réalisation



Les acteurs jouent bien. Le père, dont je n'ai pas le nom, est un peu en deçà sans pour autant être misérable et Simon, dans toute l'étendu de son court rôle, est appréciable sans voler bien haut.
La mise en place de la tension est très étrange car très brute. Le film démarre sur un film familiale avec, comme élément perturbateur, une dispute entre parents et enfant lorsqu'il apprend être adopté. Sa disparition est très brutale, car violente et inattendue, et le film se poursuit avec cette tension jusqu'à la fin.
Ici, c'est plus une horreur psychologique qu'autre chose : la disparition de l'enfant et les mois qui passent se ressentent sur le visage des parents, on revient dans le passé de Laura et ce qu'il a pu se passer après son départ, on jubile un peu, mais le film se brouille dans plusieurs histoires (la disparition de Simon, les probables esprits qui hantent la maison, la disparition des enfants de l'orphelinat des années plus tôt, Benigna,...) et, au final, on se retrouve perdu aussi, et rien ne nous intéresse à fond. A l'exception de "l'accident du berceau" et de l'apparition de l'enfant-épouvantail, rien n'est vraiment horrifiquement choquant dans le film, dans le bon sens du terme.
La lumière est maîtrisée, bien que trop lumineuse - justement - par moment, dommage.



Point de vue scénarisation



C'est bien ici le gros problème de l'Orphelinat : le scénario est bon, certes, bien traitée d'ailleurs, trop traitée d'autre part. Le réalisateur, qui avait su entraîner son spectateur à merveille avec The Impossible et que j'attends avec une certain impatience pour A Monster Calls, se perd dans son propre film. Il avait un scénario de base, deux idées, et s'est perdu entre les deux pour essayer de les combiner comme il pouvait et créer un mutant informe très étrange.


On entre ici dans la zone spoiler, olala, ça va spoiler... (NB : arrêtez de regarder le Fossoyeur à longueur de journée)


Juan Antonio Bayona a hésité entre :
- Nous plonger dans une fiction complète, esprits et médium au rendez-vous, avec des enfants invisibles qui hurlent, des grattements entre les murs,des grincements au plafond, et des silhouettes qui se glissent sous les draps et disparaissent, font des traces de pas dans le sable et s'évaporent.
- Nous plonger dans cette même fiction mais, au final, faire un twist et, comme l'avez fait The Boy, nous révéler que tout est tout à fait réaliste et que, par exemple, l'épouvantail n'était en fait que Simon déguisé qui voulait faire payer à sa mère la gifle qu'elle lui avait donné (et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autre).


Ainsi, la fin nous révèle que les coups et grincements que Laura entendait était en fait son fils qui, enfermait dans la cave, frappait à la porte pour qu'on lui ouvre. Et ce grand crac qui l'avait fait sursauté au milieu de la nuit, résonnant sous son oreille qu'elle plaquait contre le mur, c'était simplement son fils qui avait cassé les escaliers de la cave secrète et qui venait de faire une chute mortelle alors qu'elle le cherchait en dehors de la maison depuis tout ce temps. On apprend aussi que c'est elle qui l'a enfermé en le cherchant, poussant une barre en bois coinçant la porte de la cave dont elle ne connaissait pas l'existence. C'est elle qui, d'une certaine manière, a tué son fils.
Choquant, sublime, parfait.


Mais Bayona avait une autre idée. Il a donc décidé d'ajouter une medium qui, dans une scène digne d'un mélange Insidious-Paranormal Activity, nous apprend que des enfants hurlent et ont été tué ici, empoisonnés. On apprend alors que Benigna avait un fils qui cachait son visage sous un sac en toile à cause de malformation (le gosse épouvantail en lequel Simon se déguisait). Il était mort à cause des autres enfants, après le départ de Laura, qui avaient voulu lui faire une blague qui avait mal tourné. Benigna s'était alors vengée en assassinant tout les enfants qui ,aujourd'hui, hantaient la maison et aidèrent Laura à trouver le corps de son fils.


On se perd entre deux idées qui, mises chacune d'un côté, sont sympas mais donnent un rendu indigeste et incompréhensible une fois mises ensemble. Et c'est dommage ! Bayona n'aurait pas dû vouloir faire ce côté paranormal, avec Laura qui meurt et se retrouve, dans son esprit, auprès de son fils et des enfants de l'orphelinat. Il aurait dû rester là, sur ce plan de cette femme cajolant le cadavre de son fils mort depuis neuf mois. Il n'aurait pas dû s'amuser avec le "1,2,3, je cogne à la porte" et la chasse au trésor dans la maison.
Ça m'attriste de voir ce film ainsi gâché, perdu entre ces deux idées, parce que je n'ai ainsi aucun réel plaisir à le regarder, à voir le générique arriver et le père qui dépose des fleurs sur la tombe de son femme et de son fils avec un sourire niais.


Bayona a du potentiel, il le prouve bien, mais il devra, dans l'avenir, savoir contrôler ses idées pour nous pondre des films bien plus cohérents.

leaneadelaide
5
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le 12 juil. 2016

Critique lue 516 fois

L'Ours Kodiak

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