Le film choral revisité par Bellocchio accouche, non d'un thème de société conventionnel comme on aurait pu l'attendre vu le sujet (l'euthanise d'Eluana Englaro en 2008) mais du portrait d'une Italie au bord de l'implosion au travers de plusieurs individus dont le destin croise indirectement cette décision de justice, soit par militantisme soit par résonnance personnelle.
Ce qui est assez fascinant, c'est la façon, volontaire, qu'à Bellocchio d'échapper non seulement à tous les moments attendus, tel les parallélismes évident, mais aussi de contourner tous les problématiques qu'esquissent son scénario : euthanasie, religion, famille, lutte des classes, sexualité.... Seule la politique et le conformisme à la rigueur sont abordés un peu plus directement mais sans la virulence cynique de ses premiers films.
Ca n'empêche pas le film d'être régulièrement passionnant par son pays hystérisé, constamment porté à son point de rupture sans toujours que les protagonistes ne sachent pourquoi. Il y a des moments totalement fascinant tant la tensions est exacerbée sans raison réelle. Bellocchio utilise ainsi un montage abrupte et une narration malmenée pour véhiculer cette instabilité sociale. C'est encore plus saisissant quand on ne connaît pas l'affaire Englaro et qu'il faut un certain temps pour comprendre quels sont les liens des personnages vis à vis de figure médiatique omniprésente mais invisible.
L'écriture est un peu plus inégale en revanche comme les séquences avec Isabelle Huppert qui sont de loin les plus faibles tandis que tout ce qui tourne autour de la droguée et du médecin ou du sénateur et sa fille frappée par un coup de foudre irrépressible.
Il y a dans ces moments beaucoup de moments d'attentes, de frustration, d'esquives qui sont assez beaux et touchants.
Après, Le sourire de ma mère, ça semble confirmer que Bellocchio n'est jamais meilleur que quand la folie n'est qu'en filagramme, comme un élément fantomatique, laissant les protagonistes lutter avec une réalité fuyante.