Quand les Français faisaient encore de bonne comédie, "Quoi ?"

Je dois dire que je ne connais de Mocky que ses sorties médiatiques télévisuelles du temps où je regardais encore la TV, ça remonte donc à loin. Ce qui m’interloquait à chaque fois fut l’obsession et le goût du pépère pour les jolies pépètes. L’homme se vantait avec un franc-parler d’être une sorte de « baiseur fou » multipliant les conquêtes.


Je ne connais pas l’œuvre filmique de Jean-Pierre Mocky. Il aura fallu un pari perdu, initié par ma personne, avec le Kingrabbit et le hasard d’un logiciel pour changer la donne.

Une semaine pour voir le film « La cité de l’indicible peur » et en faire une critique. Merde, qu’est-ce que c’est que ce truc ?! D’où ça sort... Une semaine a passé. Je me suis fait remonter les bretelles ! Merde !

« Escroc ! » m’a-t-il écrit. Désolé Mein general, je ne recommencerais plus, promis.

« Je me suis fait eu. » comme dirait l’autre, à mon propre jeu.


Il est vrai que j’ai du mal avec les anciens films, j’ai surtout du mal avec le noir et blanc et pourtant je ne suis pas contre un bon Chaplin ou Fernandel, étrange. Inconsciemment, je dois trouver ça « ringard », forcément vieillot.

Une idée reçue comme une mauvaise habitude maladive. La vieille filmographie a du mal à m’attirer, moi, ayant été biberonné aux années 80 et 90. Elle est comme ta vieille grand-mère hideuse, trois chicots en bataille qui ne demande qu’à t’embrasser, si ce n’est pas te lécher carrément. Au fond de toi tu l’aimes bien, mais la jeunesse fait la connerie et tu ne peux pas t’empêcher, comme un mauvais gosse, de la repousser, de la regarder de loin et de lui lâcher un « t’es moche mamie » avant d’aller te cacher dans les jupes de maman.

Tu finis par mettre une bonne gifle à la face de tes idées préconçues et tu forces le respect dû à l’ancien. Pourtant, il m’est arrivé de regarder des Audiard et des Melville.


Dès les premières secondes, je l’ai ressenti. L’image est dégueulasse, cette envie de repousser la grand-mère Mocky se fait latente. Une torture visuelle. Pourtant, le dégoût de l’image cohabite avec une certaine curiosité.

« Ok, c’est vieux et moche à regarder, mais là y’a trois cavaliers sapés en Zorros sur une route avec une chanson zarb en fond « C’est la grande frousse, c’est la grande peur, prenez bien garde à l’inspecteur ! Le dénommé, Simon Triquet !... » » Et Bourvil fait son apparition, salut son camarade en sortant d’un bâtiment et sautille comme un mongole avec un sourire jusqu’aux oreilles.


On nage en plein délire, les tics de langage, de corps, les personnages hauts en couleurs. C’est n’importe quoi. J’ai l’impression de faire face à du Gaston Lagaffe . « Hep ! Hep ! » c’est assez délirant finalement. Le film sent bon la comédie surréaliste. Le Triquet un poil bébête « la Bêêête ! » traque un faux-monnayeur du nom de Mickey, « l’ivrogne frileux chauve ou portant perruque », jusque dans le village de Barges (Village au nom symbolique ramenant aux personnages farfelues qui y habitent. Le flic, le docteur, le maire « Quoi ? », le boucher, Francis Blanche en voyeur, et j’en passe) et où Triquet pendant 80 minutes tentera d’y résoudre à la fois l’histoire de la fausse-monnaie et celle de « la Bêêête ! », la cousine de celle du Gévaudan.

Je me suis laissé partir dans ce délire, le film étant, en termes de mise en scène, correct. On retrouve vraiment par moment des plans que l’on verrait bien dans des cases de bandes-dessinées types. L’univers et le style du film en soi me font faire ce rapprochement. Le choix du lieu unique également, est aussi intéressant, où les points de vue des personnages s’entremêlent et se chevauchent autour des affaires de Triquet. Un tel n’aime pas un tel, un autre et amoureux d’une autre qui est amoureuse d’un autre, permet à l’ensemble de l’œuvre de tenir 1h20 dans une bonne symbiose général.

On regrettera par moment au scénario d’être un peu facile, de ne pas aller au fond des choses peut-être. De survoler par moment les relations entre personnages.

La bonne qualité des dialogues, les tics de langage comme de corps, les personnages barges, le village, l’indicible peur de la bête, une mise en scène correcte, l'univers du film en soi font un ensemble solide et on a là tous les ingrédients pour faire une bonne comédie (surréaliste) à la française, qui m’est apparu au fil du visionnage comme un possible ancêtre de Jeunet. Et pour mon premier Mocky j’ai trouvé ça plutôt agréable et sympathique.

A voir.
demarreur
7
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le 23 nov. 2013

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demarreur

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