L'idée n'est pas mauvaise. J'ai aussi été surpris, je ne m'attendais pas à ce type de développement, je pensais que ça serait plus classique, avec des insectes qui attaquent ce bled paumé. C'est à la fois une bonne et une mauvaise surprise : bonne parce que ça fait parfois penser à du Cronenberg vu comment les corps sont exploités, mais une mauvaise aussi, parce que le tout reste un peu trop artie (plutôt que de foncer plus viscéralement dans les corps ou le film d'horreur classique) et ça dénote, une fois de plus, une peur de l'engagement jusqu'au-boutiste d'une production française dans le genre de l'horreur, et c'est bien dommage.
La mise en place est terriblement longue. En partie parce que l'auteur s'intéresse à l'aspect social : la mère a du mal à s'en sortir seule depuis la disparition du mari, le fils est paumé au point de se balader avec sa chèvre comme si c'était un chien et la fille se fait harceler à l'école parce que visiblement, les jeunes du coin trouvent ça trop craignos les gens qui font de l'élevage d'insectes. Et l'on tourne ainsi tout du long pendant un long moment, avec de temps en temps un truc un peu bizarre. Puis vient le basculement ce moment où la mère va atteindre un premier palier. Et puis... et puis plus rien ! On s'attend, tel dans un Cronenberg, à ce que ce personnage évolue, que son état empire, que le film soit axé là-dessus. Au lieu de ça, on continue de suivre toute la famille, tous les soucis, avec quelques résolutions, puis de nouveaux obstacles. Quant à la mère qui sacrifie son corps, ben c'est à peine exploité, on y revient de temps en temps, on la voit carrément acheter des litres de sang avant de revenir au sacrifice, mais c'est si peu développé qu'on ne sait pas trop pourquoi ça ne prend pas. Quant aux conflits, on ne les sent pas tellement, on est plus dans la contemplation distancée, de toutes façons on remarque vite que les résolutions arrivent seules sans qu'on en voit la construction ni même l'impact direct. Le dernier quart d'heure est plus soutenu mais écrit avec les pieds : les insectes se sauvent (suite à la répétition d'une bêtise, on remplace juste le coup de couteau par le feu, c'est pas très inspiré tout ça), attaquent les humains, mais de manière très sélectives, et toutes les séquences plus ambitieuses sont coupées ; pas subtilement suggérées, non, simplement coupées du montage, ainsi on ne voit pas le boyfriend se faire attaquer mais on voit le corps couvert d'insectes ; on ne voit pas le voisin curieux se faire attaquer mais un reste de corps un peu plus tard. L'idée n'est pas mauvaise en soi, jusqu'à un certain point, où l'on a besoin de voir l'attaque, même brièvement, même de façon suggérée, il faut vivre l'attaque, d'une manière ou d'une autre, en temps réel, et non pas passer de avant à après.
La mise en scène est soignée : une photographie agréable des lieux, un découpage correct, des effets spéciaux plutôt réussis. Le montage est trop lent, mou de manière générale et eliptique lors de scènes plus importantes. Les acteurs font le boulot. Les décors sont corrects.
Bref, le scénario n'est vraiment pas top. C'est dommage parce qu'il y a plusieurs très bonnes idées dans ce film.