Laurence Anyways est le 3ème long métrage du jeune réalisateur québécois Xavier Dolan qui fait suite aux films J'ai tué ma mère et Les amours imaginaires. Ce long métrage sorti en 2012 narre l'histoire de Laurence, un professeur de français et de sa petite amie, Fred. Dès le début on apprend que Laurence est mal dans sa peau, celle d'un homme. En effet Laurence se sent en réalité être une femme et décide de ne plus se mentir à lui-même ni aux autres. S'ensuit alors un long cheminement vers l'acceptation de son moi profond et de son identité réelle ainsi que de ses changements tant physiques que psychologiques. Xavier Dolan nous expose ici l'histoire d'un amour impossible entre Laurence et Fred. L'homme du couple qui ne le restera pas longtemps et qui pourtant aime toujours sa compagne devra faire face aux difficultés qu'engendre sa décision et au regard de la société sur sa personne dite « spécial ».


Le charme du film est due sa franchise, à la fureur de vivre qui s'en dégage. Grâce aux acteurs Melvil Pourpaud et Suzanne Clément qui interprètent avec brio leur rôle d'amants passionnés et à la mise en scène de Xavier Dolan, le film dégage une aura de véracité, bribes de vie mises à vif sous la lumière de la caméra.
Laurence Anyways est un film touchant, pleins de vie et d'une sensibilité à fleur de peau qui capte le spectateur dans son histoire d'amour à la foi passionnée et destructrice, belle mais impossible à vivre. On pourrait croire que le film est trop long, 168 minutes, mais cette longueur sert au contraire le film. En effet l'intrigue se déroule sur 10ans, permettant au spectateur de suivre l'évolution des personnages, leurs relations et leur mentalité.
Les rapports humains y sont détaillés avec des séquences de dialogue, souvent à grand potentiel émotionnel. On retiendra la scène du café, époustouflante, mettant en avant le talent irréfutable de l'actrice Suzanne Clément dans une joute verbale frisant l'hystérie, plus proche de la colère et de l’indignation, dans une narration pleine d’émois. Cette scène qui, comme tous les figurants du film, aura laissé sans voix le spectateur. Les séquences sans dialogue quant à elles, donnent le pouvoir à l'image de parler à la place des mots avec une mise en scène se rapprochant des clips vidéo, apportant une esthétique particulière au film, quelque chose de vintage et de très coloré.
La musique elle, est très présente dans la filmographie de Dolan. Laurence Anyways ne déroge pas à la règle. Comme l'a affirmé le réalisateur « la musique est un personnage du film ». Elle apporte une rythmique, une dynamique qui permet une meilleure appréciation du film. A noter des morceaux comme Fade to grey ou  Bette Davis Eyes qui nous transporte dans les années 80, 90 avec nostalgie et amusement.
Et puis il y a les scènes d'amour et de passion qui enivre le spectateur, transporté par les émotions que véhiculent les personnages et l'amour fou qui brûle en eux. Un amour impossible sur lequel joue Dolan. Sujet assez récurrent au cinéma il est vrai, mais qui est ici agrémenté par une autre contrainte, celle de la transsexualité. Ce n'est pourtant pas le sujet central du film mais bien un sujet développé en annexe, ce qui en permet une plus grande légèreté de traitement. Le film a donc une double porté : narrative et social. En effet Dolan nous montre ici le regard de la société sur ces gens différents, nous montre que même aujourd'hui le sujet est peu connu et peu compris. Il met en exergue cette part de la population qui n'est pas reconnue dans notre monde actuel et ceci sans lourdeur ni ostracisme. L'histoire de Laurence est ici l'histoire d'une révolution personnelle, d'une quête identitaire, rien de plus.


Laurence Anyways est beau, singulier et frappant. Bien que poétique, le film a sa violence, celle des sentiments et des paroles. S'en dégagent une certaine dualité et beauté paradoxale. C'est un film puissant, touchant et d'un visuel rendu bien agréable par le réalisateur Xavier Dolan qui signe là son 3ème film seulement. 3ème film et qui pourtant est déjà grandement abouti. Un film à voir si l'on aime l'esthétique de Dolan, et pour tous les autres, qui, cela ne fait aucun doute, ressortiront de cette séance cinématographique secoués et conquis par le talent des acteurs et de leur jeune et talentueux réalisateur.

colineephemere
10
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le 6 nov. 2017

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colineephemere

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