C’est toujours appréhension qu’on va voir un film qui traite d’un milieu dans lequel on vit, mais qui dans le même temps est calibré pour plaire au grand public. Fréquentant depuis longtemps l’université, c’est dans cet état d’esprit mêlant curiosité et méfiance que j’ai été voir le Brio.


Autant passer rapidement sur le film en lui-même, tant il y a finalement peu de choses à dire. Le Brio n’est pas mauvais, pas excellent. On retrouve un Daniel Auteuil dans un rôle qui lui convient parfaitement et une Camélia Jordana qui semble encore se chercher un peu, tous deux au service d’une histoire assez convenue. Le méchant professeur est contraint d’aider une jeune banlieusarde à participer à un concours d’éloquence, les deux personnages sont affreusement bornés mais on se rendra compte qu’au fond le méchant prof raciste avait un grand cœur, etc., etc. Finalement, on avait déjà vu ça dans la bande annonce. Cela dit, le film reste efficace, parfois drôle, parfois touchant. Il fait le boulot, ce qui est déjà une bonne chose.


Sur la « reconstitution » du milieu universitaire juridique, je suis assez partagé. D’un côté, l’ensemble est relativement cohérent et convaincant. Les amphis, les étudiants, les professeurs, les jeux de pouvoir à l’Université et, sujet central du film, les concours d’éloquence chers aux juristes, sont fidèlement retranscrit. De l’autre, certains détails virent parfois à la caricature (étudiants qui huent et applaudissent en amphi comme ils le feraient dans un stade ; prof qui cite les grands penseurs grecs et romains toutes les deux phrases…). Et si on passe la caricature de l’avocat offert par la dernière scène, on s’y retrouve assez bien dans ce que montre le film qui ne vire jamais au grand n’importe quoi, comme c’est souvent le cas quand un film cherche à utiliser le droit. On regrettera quand même ce message assez fallacieux qui consiste à faire croire qu’avec du charisme, on peut plaider n’importe quoi. Le droit reste, heureusement, plus rigoureux que ça.


Au final, l’ensemble est honnête, tant sur le fond que sur la forme, sans jamais transcender. Comme ses personnages, il cache sa banalité derrière de jolis mots ; il invoque Schopenhauer, Aristote ou Rabelais pour dissimuler son manque de personnalité. Alors certes, on apprécie l’écouter ; mais non, cela ne suffit pas à emporter l’adhésion.


Il n'y a pas de fond sans forme. Mais l'inverse se vérifie : sans le fond, la forme n'est rien.

L9inhart
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le 4 déc. 2017

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