Comment un tel manichéisme ose-t-il encore aujourd’hui se légitimer fresque historique ? Le pauvre paysan exploité agonise face caméra devant l’horrible agent de l’ordre en contre-plongée ; puis c’est le coup de poignard qui fait couler le sang rouge-révolte. Petit Karl était là et a tout vu ! De cette psychologisante approche bazarisée résulte un récit terne à l’hagiographie lourde. La mise en scène oscille entre ennuyeuse absence et hors-sujet – pensons ici aux scènes forestières dont le factice surréaliste frise l’outrance – mais rassemble toutefois de bons acteurs aux prestations justes et convaincantes. Le jeu sur les langues (allemand, français et anglais) illustre parfaitement le bouillonnement politique dans lequel a baigné la pensée marxiste et rend compte de sa dimension multiculturelle. Malheureusement, Le Jeune Karl Marx ne parvient pas à synthétiser action politique et vie affective, n’ayant de cesse de passer de l’une à l’autre sans élégance, comme les deux versants antinomiques d’une même médaille. Le film ne respire pas, ne fait qu’aspirer une étouffante atmosphère politique comme une fumée de cigare inhalée ; impression doublée par une composition musicale insipide. En somme, un biopic qui jamais ne surprend ni ne s’écarte de son cahier des charges, mais tombe dans tous les travers du genre.