8,5/10
Un film très moderne, très agréable surprise, qui constitue comme une charnière entre Kurosawa et Tarantino. Si la sobriété impeccable de l’image, la mise en scène soignée (la scène du battoir, la neige, la folie) les réminiscences shakespeariennes (notamment Richard III ici) font évidemment penser au premier, plusieurs scènes annoncent Kill Bill, bien sûr (les 40 fous), mais aussi Reservoir Dogs. Très bonne séquence d’introduction, qui prépare bien l’ambiguité de Ryunusoke (un assassin, mais qui accomplit la prière au Bouddha du vieillard), mais l’intelligence du propos frappe pendant tout le film, qui se plait à déjouer les attentes du spectateur jusqu'au dénouement qui n'en est pas un (le grand méchant n’a finalement pas assassiné grand monde, toute la diégèse tourne autour de l’amourette et de la vengeance du frère, qui finalement ne joue pas d’autre rôle que celui délégué par Barthes aux « effets de réel », comme c’est le cas pour l’intrigue politique ; aucun personnage important ne meurt, à la seule exception…de Serizawa, c’est dire !). Preuve ultime de l’intelligence de cette œuvre, les « répliques-cultes », dialogues bien sentis etc. que le genre du film de samouraï appelle, sont extrêmement rares (« A sabre pervers, âme perverse »), et n’ont aucune utilité véritable dans le récit, ce qui peut dénoter une éventuelle volonté de détournement du film de samouraï, plutôt torturé ici dans le sens d’un film psychologique plus noir et plus complexe. (critique de 2011)