Le Voyage d'Arlo
6.1
Le Voyage d'Arlo

Long-métrage d'animation de Peter Sohn (2015)

Comme il est stipulé dans la critique concernant Vice-Versa, Pixar nous revient en cette année 2015 après un an d’absence et plusieurs projets d’errance commerciale (hormis un excellent Toy Story 3) non pas avec un long-métrage mais deux. Et donc, après le succès incontestable des émotions, le studio s’attaque cette fois-ci aux dinosaures avec Le voyage d’Arlo (The Good Dinosaur en VO), un projet de longue date étant donné qu’il était prévu pour 2013. Une production bien laborieuse (dont le départ du réalisateur Bob Peterson) ayant touché ce film d’animation dit original (n’étant ni une suite ni un prequel) nous a cependant fait douter sur le rendu final. Le jour J est enfin arrivé, l’occasion de voir si nous tenons-là le digne successeur de Vice-Versa et des autres chefs-d’œuvre de Pixar.


La première chose qui frappe dès le visionnage de ce long-métrage, qui se remarquait déjà avec les diverses bandes-annonces, c’est son visuel. N’allons pas par quatre chemin, il s’agit-là du plus beau film d’animation qui m’ait été donné de voir depuis Toy Story premier du nom, alors qu’il existait déjà certains prétendants au titre au fil des années (Happy Feet, Le Royaume de Ga’Hoole…). À part de sympathiques personnages animés avec beaucoup de savoir-faire soit dit en passant, les décors du Voyage d’Arlo sont d’une beauté renversante. Il faut entendre par là que c’est derniers sont d’un réalisme visuel à toute épreuve, nous faisons presque croire à une réalisation similaire à celle de Dinosaure : des personnages en images de synthèse ajoutés à de véritables paysages filmés avec une caméra. Bien entendu, ce n’est pas le cas ici, ce qui ne fait que renforcer le photoréalisme de l’œuvre : la surface de l’eau, les arbres dansant dans le vent, les montagnes lointaines, les galets, l’herbe… tout semble crédible à nos yeux !


Et c’est malheureusement la seule chose à retenir de ce Voyage d’Arlo (son animation), le film n’ayant concrètement rien d’autre à nous mettre sous la dent. Et c’est d’autant plus navrant de la part d’un studio qui ne marche que par la créativité, ayant pourtant fait son grand retour avec Vice-Versa, d’enchaîner avec un film aussi simple et paresseux que celui-ci. Un douloureux constat qui se remarque avec le scénario, ce dernier reprenant bêtement celui du Monde de Nemo et ce sur bien des points : au lieu d’avoir un poisson devant parcourir un monde qu’il ne connait pas et affronter ses peurs (l’océan) afin de retrouver quelque chose (son fils) tout en faisant des rencontres en chemin, nous avons un dinosaure devant parcourir un monde qu’il ne connait pas et affronter ses peurs (l’orage, la disparition de son père) afin de retrouver quelque chose (sa famille, son chez-soi) tout en faisant des rencontres en chemin. Et si cela ne parvient pas à vous convaincre, arrêtez-vous sur des personnages à la similarité des plus douteuses : à la place de gentils requins, nous avons de gentils T-Rex, avec Richard Darbois au doublage français dans les deux films.


Un script faisant preuve de fainéantise qui n’assume même pas ses partis pris. Que ce soit une ambiance western inattendue (musique country, des T-Rex cowboys, des codes propres au genre…) ne parvenant jamais à se mettre pleinement en avant ou bien un concept initial alléchant (« et si les dinosaures n’avaient pas disparus ? ») ne servant que de prétexte à la rencontre entre un dinosaure et un être humain. Alors que nous étions en droit d’attendre à un brin de folie et d’inventivité (quitte à avoir une version enfantine de La Planète des Singes mais avec des sauriens préhistoriques) comme l’avait fait Nemo, nous avons juste une aventure banale durant laquelle les personnages principaux ne font que des rencontres pour le moins anecdotiques (celle avec le Collectionneur ne sert strictement à rien), tout en se montrant avare vis-à-vis de son concept (des Apatosaures fermiers, des T-Rex gardant du bétail et un bestiaire animalier rachitique).


Mails il ne faut pas lui jeter la pierre : Le voyage d’Arlo reste une aventure très plaisante à suivre. Alors oui, cela manque cruellement de poésie et d’émotions fortes comparé aux autres films Pixar, se rapprochant pour le coup bien plus d’un DreamWorks. Cependant, l’ensemble comporte bien assez de situations et de personnages drôles mais surtout matures pour se montrer touchant au point de vous faire verser quelques larmes (et j’en suis témoin !). Et même si le film ne marquera pas les esprits, il saura vous émouvoir le temps de quelques séquences traitant de sujets complexes pour les plus petits, tels que le deuil et la confiance (en soi et envers les autres), et universels pour le public dans son intégralité (dont l’amitié et le surpassement de ses peurs). Ce qui en fait une aventure qui ne soit pas vide de sens, ce qui place Le Voyage d’Arlo bien au-dessus des titres commerciaux de Pixar (Cars 2 et Monstres Academy en tête).


Loin d’être une œuvre « pixarienne » faisant honneur à Vice-Versa car manquant de magie et de créativité, Le Voyage d’Arlo restera comme le plus beau film d’animation, visuellement parlant, qui puisse exister à ce jour. Dans tous les cas, il ne s’agit que d’une sympathique aventure ne sortant jamais des sentiers battus mais qui arrive tout de même à nous toucher à défaut de nous émerveiller. Une bien belle déception donc, sans être pour autant un mauvais film d’animation.

Créée

le 26 nov. 2015

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