Inutile de souligner les conditions difficiles dans lesquelles se sont déroulées les prises de vue de Leave no Trace, dans la rain forest de l'Oregon, où comme son nom l'indique, il pleut la majeure partie de l'année. Mais c'est justement à cause de ces situations climatiques inconfortables, pour les techniciens et les acteurs, que le film possède une véritable authenticité, encore renforcée par un travail admirable sur la bande-son, pour capter les bruits de la forêt. Dans la continuité de Winter's Bone, mais avec encore davantage de sensibilité, Debra Granik s'attache au portrait de marginaux, un père et une fille, reliés par une relation fusionnelle. La réalisatrice ne donne que le minimum d'informations sur le passé de ses protagonistes. C'est frustrant mais rationnel eu égard au désir des deux personnages de s'exclure de la civilisation. Le film ne juge pas, il est dans la bienveillance, que ce soit pour ces ermites volontaires ou pour les gens "normaux" et conformistes qui les côtoient quand ils sortent du bois. La pression sociale est forte, pourtant, c'est un fait, comme s'il y avait une envie générale de montrer qu'il y a un seul chemin à suivre, qui passe par l'acquisition d'une maison, d'une voiture, d'un téléphone ... Leave no Trace ne plaide pas pour le refus de la consommation et ne se transforme pas en plaidoyer écologique, du moins pas explicitement, mais montre simplement que choisir sa vie et avoir sa liberté de penser n'est pas aussi facile qu'il y parait. Le film n'a pas la prétention de démontrer quoi que ce soit, il se contente de montrer un père et sa fille, un peu différents du monde qui les entoure, au fil d'une fiction qui ne refuse pas le romanesque, même sur un mode minimaliste. Et l'on ne peut qu'être subjugué par l'interprétation lumineuse de la jeune néo-zélandaise Thomasin Harcourt McKenzie, au côté d'un très sobre Ben Foster.

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le 18 sept. 2018

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