6,25/10
Il y a des années que John C. Reilly n’est qu’un second couteau apprécié dans le cinéma états-unien, le genre de visage que l’on remarque à force de voir partout, dont on apprécie toujours l’interprétation forte, jusqu’à ce que sa présence soit phagocytée par la présence de ses partenaires prestigieux. Avec Les Frères Sisters encore il y a fort à parier que le nom de Joaquin Phoenix a davantage permis de faire parler du film que le sien, alors même que c’est Reilly qui avait optionné le roman de Patrick deWitt, que c’est lui qui avait approché Audiard pour lui en proposer l’adaptation, que c’est lui encore qui a proposé que Phoenix incarne son frère. Celui qui jouera bientôt John Watson et Oliver Hardy rêve enfin de rôles principaux, et Les Frères Sisters est propre à lui donner un peu de la visibilité qu’il mérite.
À l’origine, les frères Sisters devaient même ne poursuivre qu’un MacGuffin à travers l’Oregon et la Californie, avant qu’Audiard et son scénariste attitré Thomas Bidegain ne décident de donner un plus grand rôle aux fugitifs, Jake Gyllenhaal et Riz Ahmed, à leur projet d’une société idéale inspirée de Fourier, et à leur relation délicatement homoérotique. C’est d’ailleurs là que l’on croit déceler le mieux le poids de Reilly dans le processus créatif : son personnage a le plus de profondeur et le plus d’espace pour révéler des émotions, une évolution, bref un personnage, quand les autres acteurs restent suspicieusement en retrait, dessinés avec juste assez de finesse pour que l’on s’étonne de leur peu d’existence, prétextes autant à faire avancer l’intrigue, à soutenir le propos du réalisateur, qu’à laisser de la place à celui qui s’impose comme l’acteur principal d’un film qui prétendait en compter deux (si l’on se fie au titre) ou quatre (si l’on se fie au casting).
La suite de ma critique ici : https://cinemaeldorado.wordpress.com/la-lettre/la-lettre-darchimede-99/les-freres-sisters/