En deux lignes :
Une conférencière télépathe est sauvagement assassinée. Marcus Daly, pianiste témoin du meurtre, décide de mener son enquête.
Et en un peu plus :
Si Dario Argento était un peintre, il serait probablement maniériste, expressionniste ou baroque, et Profondo Rosso son tableau programmatique. On retrouve en effet condensé dans ce film tout ce qui constitue l’œuvre du cinéaste italien, et les codes du giallo qu’il a popularisé dans les années 70 : une forme de théâtralité exacerbée, un goût pour les effusions de sang et de violence, une maniera identifiable entre mille, entre exagérations visuelles et leitmotiv – gants noirs, caméra subjective, lames rutilantes, pratique du très gros plan qui se retrouvent de films en films –, une façon de déformer l’image et de jouer sur ses leurres, mais aussi de travailler la couleur dans sa matérialité même.
Profondo Rosso est très clair sur ce point. Il y aura du rouge bien sûr, du rouge profond même, celui de l’hémoglobine qui n’est plus seulement chez Argento le fluide vital que l’on connaît, mais une matière esthétisée, picturale, d’une épaisseur telle qu’elle rappelle moins le sang que la peinture à l’huile, à partir de laquelle se déploie une grammaire visuelle et symbolique à la fois complexe et outrancière : au rouge sang se mêlent ainsi le rouge des lèvres, le rouge des rideaux de théâtre qui s’ouvrent et se referment, le rouge des néons et des lampes qui cherchent, dans la nuit noire, la trace d’un meurtrier, mais aussi et surtout le rouge des pulsions morbides, du désir et du feu dans quoi viennent s’abimer les personnages du film et le regard des spectateurs.
Le rouge sature ainsi l’écran et fait vibrer la toile chez le peintre Argento. En ce sens, Profondo Rosso est un film qui n’a jamais été si peu giallo – ou à tel point.