En deux lignes :
Durant la guerre de Sécession, trois fines gâchettes se mettent en quête d’un trésor caché.
En un peu plus :
Il existe deux types de cinéma, prétend-on souvent. Le cinéma de divertissement, et le cinéma dit “d’auteur”. Le premier commettrait des machins, genre Fast & Furious 9, alors que le second cisèlerait des classiques tels que Citizen Kane. D’un côté l’éphémère bouillasse de la culture populaire, de l’autre, le marbre intemporel de l’Art.
En creusant un peu, on ne peut que constater que cette typologie commode est au mieux simpliste.
Les westerns classiques qui avaient mis à John Wayne le pied à l’étrier ou offraient à Cary Grant et Ronald Reagan l’occasion de poursuivre leur chevauchée vers la gloire étaient au début des années soixante en perte de vitesse. C’est alors, qu’en marge des films de série B diffusés par la télévision, on vit apparaître ce que les critiques nommèrent avec un certain mépris des westerns spaghettis et parmi eux Il buono, il brutto, il cattivo, « une manipulation baroque », « le plus cher, le plus hypocrite et le plus répugnant film du genre », qu’on éprouve l’irrésistible tentation « d’appeler Le mauvais, l’assommant et l’interminable, parce qu’il l’est » selon des critiques en vue de l’époque. Le goût de Sergio Leone pour la violence, l’immoralité de ses récits étaient également décriés, puisque « ce en faveur de quoi les héros de westerns américains se battent – tout ce à quoi les spectateurs sont censés s’identifier – y est omis ». Loin de pouvoir prétendre à la noblesse d’une œuvre digne de ce nom, Il buono, il brutto, il cattivo n’était donc qu’un insidieux appel aux plus bas instincts de la foule, à peine diffusable.
La meilleure réponse à ces derniers reproches tient sans doute dans le titre de l’œuvre elle-même. Dans les scènes qui les présentent au public, le bon, la brute et le truand abattent chacun trois personnes et, par la suite, le récit montre à de nombreuses reprises que l’avidité est le principal moteur de leurs actions. Ainsi, dans le film de Leone, le manichéisme du western a-t-il volé en éclats pour se déplacer vers un simple rapport de force. S’il y a deux types d’humains, ce ne sont plus les bons et les mauvais, mais ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent. Là où d’irréprochables héros affrontaient d’infâmes scélérats ou des Indiens barbares pour défendre la veuve et l’orphelin ne se rencontrent plus que des canailles et des victimes. Contrairement à la mythologie mise en place par les classiques hollywoodiens, « l’Ouest a été bâti par des hommes violents et sans complication, expliquait Sergio Leone, et c’est cette force et cette simplicité que je cherche à restituer dans mes films ».
Et cependant, ce western séminal est loin d’être une ode à la violence nihiliste. L’absurdité de la guerre y est constamment dénoncée, ainsi que son cortège d’horreurs (camp de prisonniers, exécutions sommaires, mutilations, etc.). Le spectateur attentif peut d’ailleurs soupçonner Leone d’avoir une vision plus morale qu’il ne le prétendait, ne serait-ce que le temps d’une cigarette ou d’une chanson.
En définitive, la typologie du titre est trompeuse jusqu’au bout : si le bon y est généralement dépeint comme un truand sans scrupule, les faiblesses de la brute font apparaître son humanité... avant que la fièvre de l’or ne l’engourdisse.
Et en quelques images :
Bande-annonce alternative.