Je m'attendais à bien pire, parce que les films sur les troubles de l'identité sexuelle, ça va merci, on donne, tous les jours. On dirait qu'il n'y a que ce thème obligé dans le cinéma en ce moment.
Ce film n'est pas une comédie, si je devais le considérer comme une comédie, je lui donnerais la tête à Toto. Vraiment.
Comédie dramatique j'aurais compris, le mot "comédie" empêchant peut-être qu'on prenne tous les délires et métaphores du réalisateur au pied de la lettre. ça doit être un garde-fou.
Car jamais il ne fait rire, ni sourire, et il est insupportablement nombriliste. A certains moments, nombreux, on a envie de lui hurler: mais on s'en fout de ta vie!
Mais parmi tous ses défauts insupportables, je lui trouve des choses, paradoxalement, attrayantes !
Pour commencer, on est bien loin des terriblement mauvais acteurs en femmes, comme Gad Elmaleh et consorts, qui se croient bons en plus.
Gallienne, je le trouve super bon en femme, jamais il ne fait dans la caricature. C'est le meilleur jeu d'acteur français que j'ai vu en femme, puisqu'il arrive à en imiter, même assez masculine, sans en faire trop ou trop peu, le ton juste. Le personnage de sa mère, on pourrait vraiment le prendre pour une femme. C'est vrai qu'il vient de Comédie Française. Moi je veux un césar pour son interprétation.
✓Fait !
Ah pour une fois!
Mérité.
Je tempère tout de même un tout petit peu: autant je le trouve extraordinaire dans le rôle de la mère, autant le côté nunuche de son personnage-garçon, énerve quand même pas mal. Du coup, je lui laisse la moitié du césar.
Ensuite, l'angle bizarre adopté par le film.
Le thème du film, c'est un One Man Show raconté en film ! Non mais, il est dingue.
Oui, c'est très bizarre comme idée. Et très casse-gueule.
Eh bien, sur cette idée loufoque et suicidaire, je trouve qu'il n'aurait pas pu s'en sortir mieux, même dans l'hypothèse où on considère l'idée comme plus ou moins pourrie, il faut vraiment lui reconnaître ça au moins. Si t'as une idée discutable ou étrange, au moins réalise-la avec application. ça doit être les leçons de sa mère qui portent.
Autre choix bizarre, il fait sa biographie, repasse le fil de sa vie de petit garçon puis d'adolescent, il revit ça de l'intérieur, ses frustrations, ses échecs, et se projette l'histoire qu'il nous conte avec son corps de maintenant !
C'est logique dans un sens, mais ça crée souvent un gros malaise. A des moments, c'est pathétique de le voir tenir un discours d'enfant, maman-maman, on a l'impression d'un gros débile (et là il aurait pu le jouer mieux sûrement)
Passés ces moments de malaise, c'est touchant, car il lui aurait été beaucoup plus facile d'amollir le cœur du spectateur en mettant vraiment un tendre petit bambin, en lui faisant tenir ce discours de supplication d'amour pour sa maman. Alors là, une seule voix se serait élevée pour dire que c'est le film le plus émouvant du monde. Envoyez les violons.
Du coup, je le trouve honnête dans sa démarche. Il veut raconter ce qu'il a vécu de l'intérieur, et ne joue jamais sur la corde à violon. C'est rare.
Parce que, quand ils ont la possibilité d'ajouter des tire-larmes sur des sujets où il est de bon ton de s'indigner, dans la quasi-totalité des cas, ils le font. Pas vrai?
Honnêteté aussi dans la peinture des codes homosexuels, qui peuvent être très violents. Ce n'est pas le premier film qui en parle par contre.
Dans les défauts, on pourra aussi compter les scènes qui ne servent à rien à part tirer le film en longueur, la scène du lavement n'a pas vocation à être comique (ou si c'est le cas, c'est franchement raté), car je pense qu'elle est vraiment biographique. Mais on aurait franchement pu s'en passer, j'ai pas un très grand intérêt pour la proctologie. Devant son psy, je peux comprendre l'importance, mais ça ne nous avance franchement à rien.
Il y a un côté Woody Allen dans la description des rapports avec la mère, et son ombre portée immense, la causticité en moins. (La dernière phrase, surtout, si elle n'est pas à se rouler parterre, aurait pu être du Woody Allen.)
Les interventions fantomatiques et fantasmagoriques de la mère, dans le rôle du Surmoi, ça aussi, c'est très Woody Allen, elles ne sont jamais ridicules, et ça c'est quand même fort ! Alors que ça aurait pu si facilement tomber dans la farce. Obligée de dire qu'il y a une maîtrise dans ce film. (Seul le côté garçon-nunuche ne peut pas être considéré comme une grande preuve de maîtrise.)
En conclusion: Vous êtes prévenus, c'est un film d'auto-psychothérapie, il faut aimer ou même supporter le genre.
Mais en revanche, sa propre analyse et l'analyse des névroses familiales, il le fait très bien, et il a une vision relativement lucide de leur impact sur la genèse des troubles de son identité sexuelle.
à noter que si ça aurait pu être un film sur la transsexualité, car il s'est senti fille dans un corps de garçon, on ne comprend pas bien ce qui lui fait changer d'avis.
Je devine que beaucoup de gens ont été très très déçus par la chute, et ont révisé leur jugement sur le film, pratiquement uniquement à cause de la chute (qu'ils se l'avouent ou pas), qui ne va dans leur sens souhaité. Très bon film s'il avait été aussi homo qu'on attendait de lui...
En cela, ils agissent comme sa famille.
C'est ironique. On n'a pas l'habitude de voir ça, car dans tous les films, on nous raconte l'histoire d'un garçon dont on attend l'hétérosexualité, et qui veut crier au monde ce qu'il est vraiment. "Mais pourquoi on ne le laisse pas être ce qu'il est au fond de lui, bordel."
Ici, on a la même chose, mais dans le sens inverse, sa mère est aussi déçue que certains spectateurs du fait qu'il ne soit pas "à 100%" homosexuel. Dans les deux cas, même chose.
Et c'est aussi ça qui manque dans la plupart des films qui traitent de l'homosexualité, on ne voit pas certains rouages cachés, comme une mère que ça arrangerait bien si son fils pouvait être gay (ça arrive!), ou le rôle des névroses familiales.
Mais je les rassure, dans la vraie vie,ce garçon se dit bi.