Il faut fromager les varices!

1974. Ca va mal : la direction de la Radio Suisse Romande se voit obligée de revoir ses programmes. Foin de débat et d’enquêtes, il faut du léger, de l’agréable. De quoi charmer la ménagère de moins de 50 ans, en somme. Après avoir épluché la (maigre) liste des suggestions, le choix d’un programme sur l’aide hélvetique au Portugal est sélectionné et une équipe est envoyée : une jeune journaliste féministe, un ancien grand reporter , un preneur de son au bord de la retraite et un jeune interprète fan de Marcel Pagnol vont écumer les routes du Portugal, et subir déconfitures après désillusions. A deux doigts de rentrer en Suisse, ils vont par hasard croiser leur destin et se retrouver en pleine Révolution des Œillets, évènement qui va les pousser à se redécouvrir.

Le film a un mérite certain de savoir faire la transition toute en douce entre histoire et Histoire, entre une odyssée un peu bancale à la recherche des apports de la civilisation helvétique à une civilisation « inférieure quoique sympathique » et une plongée dans une révolution pacifique, entre l’émotion d’un moment historique et une folle nuit d’amour pour Sophie, Bob, Pelé et beaucoup d’autre monde, entre l’éveil d’une nation à la démocratie et le discours enflammé de Cauvin sur l’importance, dans son portugais très approximatif, de « fromager les varices », entre la drôlerie des suppositions des journalistes quant à l’orientation sexuelle du directeur des programmes et l’émotion d’un Cauvin perdant peu à peu la mémoire. Du coup, difficile de qualifier ce film, tour à tour drôle et poignant, et on ne peut que louer la qualité des acteurs qui rendent les personnages si attachant, particulièrement Cauvin, à qui cette révolution va redonner un sens à la vie, et Sophie, qui s’affranchie pour de bon de ses préjugés et assume enfin son féminisme.