Forcément, découvrir les oiseaux en 2016, à l’heure où les télévisions 4k forcent leur entrée dans les foyers, où la VR te savate la tronche à 360° et où le grand spectacle se résume souvent à un duel entre des moteurs de rendu d’effets spéciaux assistés par ordinateur, lui ôte l’impact qu'il a pu avoir à sa sortie. Film alors ambitieux dans sa folie visuelle, en 1963, il était bien plus délicat de filmer un pauvre bougre se faire déboîter la boîte crânienne à coups de becs, et force est de constater que même si certaines séquences accusent leur âge, en règle générale, Les oiseaux est une bobine de belle tenue.


Si je sors de la séquence un brin mitigé, c’est que le souci, à mon sens, est ailleurs. Dans l’exploitation sans inspiration de certains personnages écrits à la truelle d’abord —entre l’instit’ désespérée, la gamine qui enlace une inconnue parce qu’elle lui a offert 2 oiseaux et la mère qui n’arrive pas à faire son deuil, c’est Byzance—, mais aussi et surtout dans la romance bancale qui se joue à l’écran entre une fille à papa sur le chemin de la rédemption et un avocat charmeur qui tente de remplir avec panache les chaussures vides de son défunt paternel. A vouloir trop en faire Hitchcock se perd dans des trames qui ne trouvent jamais leur accomplissement, résultat, le temps d’antenne se fait sentir, l’homme a du mal à gérer le rythme de sa bobine, pendant une bonne heure, l’ennui est palpable.


Heureusement, les piafs se mettent à donner du bec, la sieste peut alors prendre fin. Du cadavre d’un fermier énucléé, qui a certainement déclenché des petits cris stridents dans les salles à son époque, Hitchcock tire enfin l’énergie qui manquait pour aligner les séquences marquantes. Dommage qu’il parvienne difficilement à la canaliser jusqu’au dénouement. Les personnages accessoires de la première heure sont sacrifiés sans vergogne sur l’hôtel du grand spectacle, les protagonistes se mettent à faire des choix discutables pour permettre à leur metteur en scène de s’amuser avec ses marionnettes —Mélanie qui va faire joujou avec les mouettes à l’étage, incompréhensible— et la note finale, bien que poétique et pleine de sens, manque un peu de panache.

oso
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le 17 sept. 2016

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