Qu’il semble ardu d’exister dans l’ombre des géants que sont Pixar, Dreamworks et cette frange de studios de moindre envergure qui, en dépit de moyens plus limités, illuminent le cinéma de leur intelligence créative. Une façon de dire qu’il est possible de s’y faire une place, à raison de plus si vous possédez la force de frappe d’une production estampillée Columbia/Sony Pictures : mais, comme bien souvent, la quantité est rarement un gage de qualité…
À première vue, Open Season pouvait y aller de son petit effet : c’est-à-dire de maintenir l’illusion, surtout via un humour omniprésent, composant par voie de fait un divertissement sympathique à l’ambiance bon enfant. Néanmoins, le temps fini par passer, et les exemples de réussites (de tous bords) se multiplient : il devient alors évident que, n’en déplaise à des souvenirs complaisants, le long-métrage de Roger Allers et Jill Culton n’est en rien une œuvre louable.
Non pas qu’il faille lui jeter la pierre, les tribulations de Boog et Elliot demeurant délurées et sans prise de tête, mais l’évidence s’impose d’elle-même : c’est sacrément pauvre, et ce sur tous les plans. Le regard paradoxalement attiré par sa ribambelle de décors appauvris, pour ne pas dire dénudés, son animation au rabais saute littéralement aux yeux : le design résolument cartoonesque de ses personnages est certes amusant, mais convenons que c’est bien peu, d’autant qu’Open Season a cette fâcheuse tendance à trop en faire pour sauver la face.
Sans envergure d’aucune sorte, ses principales prétentions pourraient donc résider dans son « choc des cultures », soit l’énième rencontre entre le monde humain et celui sauvage : avec pour socle commun le balourd Boog, pas aidé par le doublage rébarbatif de Martin Lawrence, cette intrigue aurait pu s’en sortir davantage si elle n’avait pas autant repompé les fondations d’un certain Shrek. Le mimétisme vis-à-vis de sa rencontre (et le duo qu’il formera) avec l’Âne, ainsi que la trame autour de son appartenance à un univers qu’il rejette en bloc, est tel qu’il est impossible d’attribuer à Open Season toute once de fraîcheur.
Vivant et mourrant au rythme de ses facéties sans garde-fous, ce long-métrage pesant (tout de même) 85 millions de dollars paraît bien creux : si les plus jeunes y trouveront peut-être leur compte, il n’en ira pas de même pour les spectateurs plus (ou moins) avertis, lassitude et autres sourires résignés faisant rapidement leur nid dans ce gloubi-boulga prévisible de bout en bout. Il va donc sans dire que nous nous épargnerons la peine de découvrir ses suites, toutes sorties (ô surprise) directement en vidéo.