Les vingt premières minutes sont celles d'un Fincher, d'un thriller parfaitement aiguisé où le montage alterné révèle peu à peu une intrigue sournoise, un schéma familial immoral très rarement mis en scène, une tragédie dont les héros ne se relèvent pas, où la faiblesse humaine l'emporte sur la droiture et la compassion. Le travail associé au son est épatant, la bande originale s'orchestre de violons décélérés pour venir se fondre dans un rappel à l'alarme des pompiers tandis que ces derniers montent, en slow motion eux aussi, des escaliers menant à quelque chose , car je n'ai pas dans l'idée de vous spoiler. Les transitions à l'image sont réfléchies, accentuent d'ores et déjà l'enfermement dans lequel Dani l'éplorée évolue tant bien que mal après un traumatisme familial.


Les personnages, très peu écrits, paraissent néanmoins intéressants à première vue parce qu'ils ne sont pas de ceux qui font s'abattre des armées adverses par un geste de leur paume de main, ou qui ressemblent à ces idoles des temps anciens dont les mots d'ordre sont : loyauté, force et victoire. Ce sont de simples petites gens qui ne parviennent pas à communiquer, s'enfermant dans un mutisme qui, je vous l'avoue, devient franchement pénible passée la première demi-heure. La bande de copains s'avère alors inévitablement représentative du cliché lycéen, j'ai nommé L'Intello, L'obsédé sexuel, L'artiste et Le A-Peu-Près qui exaspère par son manque total de personnalité.


L'élément déclencheur de l'action éveille alors la curiosité du spectateur, sous la forme d'un festival païen suédois organisé par une communauté en autarcie dont l'artiste de la bande fait partie. L'invitation au festival célébrant la Saint Jean, ou le solstice d'été, constitue un regain d'intérêt puisque, débutant par une initiation à la consommation d'hallucinogènes, l'on se doute qu'il va se passer des choses pas très nettes durant son déroulement. On est loin du compte hélas.


La tradition sera tout de même perpétrée en guise de clou du spectacle macabre par un feu de la Saint Jean, à la simple différence qu'ici chez les toges blanches on crame des mecs déguisés en ours.


Le pathos règne en maître sur la durée de ce film qui prend des proportions grotesques pour se fondre en un spectacle malsain, à demi cynique, un film d'horreur en somme, ainsi que son genre l'indiquait pourtant. Toutefois, nous en sommes déçus. Les dangers de la secte y sont remarquablement mis en scène mais beaucoup trop acceptés par les participants extérieurs pour être finalement crédibles. Ce sont les irrégularités scénaristiques qui peinent à faire de MIDSOMMAR un film d'épouvante efficace, ne serait-ce qu'un drame pertinent. Evidemment, la métaphore du deuil et de l'acceptation au travers de danse effrénées et de costumes de fleurs est palpable, mais un tableau audiovisuel ne peut être simplement réussi esthétiquement. Il lui faut une âme. Or d'âme, ce film n'en a pas.

eleonoreoldwood
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le 28 août 2019

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eleonoreoldwood

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