Le film est bâti autour de deux situations dramatiques fortes qui prennent la forme de quêtes existentielles profondément déchirantes. Celle de Sarah Jane fait référence aux jeunes mulâtresses obsédées par la volonté d’être identifiées comme blanches dans les premières décennies du XXe siècle aux États-Unis et dont le destin s’avérait souvent tragique. Tandis que celle de Lora s’inscrit dans le rêve hollywoodien provoqué par l’effervescence des années folles. Sarah Jane a le choix entre l’acceptation et la fatalité. Dans la dernière minute du film, on devine que c’est la mort et non l’amour de sa mère qui réussira à apaiser son obsession et stopper sa descente aux enfers. Le parcours de Lora est bien différent. Après des années à espérer percer le métier à travers des situations humiliantes, elle goute finalement à la gloire pendant dix ans. Une fois rassasiée, elle désenchante devant l’artificialité du show business et en mesure les conséquences sur sa vie amoureuse et sur sa relation avec sa fille. Tous les éléments d’un bon mélodrame sont réunis. Les comédiennes s’y donnent avec générosité bien que le jeu de Juanita Moore soit particulièrement juste et touchant, autant dans la douce amitié maternelle qu’elle développe avec Lora et Suzie que dans sa douloureuse impuissance à raisonner sa fille. Le dernier film de Douglas Sirk à Hollywood aborde des sujets costauds. Même si cela manque parfois de subtilité dans la présentation, il suscite la réflexion. Il honore la vérité au détriment du paraître.

Elg
7
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le 7 juin 2018

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Elg

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