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Before I Wake (Mike Flanagan, U.S.A, 2016)

Avec ‘’Hush’’, Mike Flanagan mettait de côté ses obsessions liées à la famille, à l’abandon, au deuil, au chagrin, à l’acceptation et la reconstruction suite à la perte d’un être cher. Sa seconde production de 2016 fait tout l’inverse, pour se construire autour de l’idée du deuil. Celui lié à la perte d’un enfant, sujet peu facile, traité ici avec onirisme.
De l’aveu même de Mike Flanagan, ‘’Before I Wake’’ n’est pas à considérer comme une œuvre horrifique, mais plus comme une ‘’fable’’ ou un ‘’drame supernaturel’’. Ce qu’elle est certainement, même si le déroulé du récit, et quelques scènes se prêtent aux frissons, basculant même par moment dans l’épouvante la plus pure.
L’histoire est celle de Jessie et Mark, un couple ayant perdu leur jeune fils, Sean, suite à une noyade accidentelle. Dans un processus de reconstruction ils décident de se proposer comme famille d’accueil. Non pas pour remplacer Sean, mais pour donner ce trop-plein d’amour qui est le leur, à un enfant qui n’en a plus. Un échange de bon procédé, qui si dans un premier temps peut ne pas sembler particulièrement sain, dans un second temps n’est pas du tout sain.
Il leur est alors confié Cody, un jeune orphelin, intelligent, adorable, calme et poli, soit la crème de la crème. Sauf que sa présence déclencher des événements étranges. Dès qu’il plonge vers le sommeil, des papillons de toutes les couleurs apparaissent soudainement. Au départ cela crée l’émerveillement des parents de substitutions. Mais bien entendu, rapidement ça se transforme en cauchemars éveillé. Sinon y’a pas de film.
‘’Before I Wake’’ convoque toutes les thématiques inhérentes au cinéma de Mike Flanagan. Jessie et Mark cherchent à faire le deuil de leur fils, quand Cody doit faire celui de sa mère. Ensembles ils progressent dans la réparation de leurs chagrins incommensurables, s’épaulant sans même le réaliser. Avançant lentement vers une paix intérieure, pour laquelle le temps est un allié.
Si pour Mark la complicité avec Cody nait simplement, sans malaise, puisqu’il ne projette pas sur lui son enfant disparu, pour Jessie c’est une autre paire de manches. Elle a plus de mal à accepter la perte de Sean. Au point de sombrer par moment dans une attitude malsaine. Il semble que pour elle accepter la disparition de Sean c’est l’oublier. Hors, ce n’est pas le cas. Ce n’est pas.
Toujours entourés de sa fine équipe, Mike Flanagan livre avec ‘’Before I Wake’’ un film bien plus fort qu’il n’y paraît au premier abord. D’une grande richesse, visuelle et réflexive, elle apporte une nouvelle pierre à l’édifice de son œuvre. Avec une mise en scène prenant le temps de poser l’histoire et les personnages, pour les faire progresser jusqu’à un déchainement d’épouvante finale, le métrage s’avère bien plus proche du songe cauchemardesque, que de l’horreur pure.
Toutefois, il y a tout de même à redire sur le casting. C’est malheureux, mais Kate Bosworth, une actrice assez médiocre, passe complétement à côté de son personnage. Tombant sans arrêt dans un jeu pathos des plus gnagnan, elle peine à donner un minimum de texture et de profondeur à Jessie. De plus, son duo avec Thomas Jane (Mark) ne fonctionne pas.
Si l’alchimie entre Thomas Janes et Jacob Tremblay (Cody) est parfaite, celle avec Kate Bosworth est le gros point faible du film. Ça ne passe pas tout simplement. Incapable de donner de la variance à un jeu d’une platitude confondante, ça rend quelques passages difficiles à regarder. Et c’est dommage, parce que l’écriture est solide, la mise en scène est une fois de plus élégante, et il y a une volonté de proposer plus qu’un banale film d’horreur.
Et c’est là bonne idée du métrage, car ça lui donne une dimension toute particulière, avec toute la magie qui peut se dégager, pour faire naitre une opposition entre la trouille engendrée par la présence d’un être obscur dans les cauchemars de Cody, et les papillons colorés qui apparaissent. Il doit ainsi gérer, du haut de ses 8 ans, un pouvoir incontrôlable, symbolique d’un passage précoce à la puberté, engendré par un traumatisme dont il n’a pas conscience. Soit le décès de sa mère, se répercutant tout au long du récit, pour trouver un dénouement final choquant et inattendu.
‘’Before I wake’’ est une œuvre en demi-teinte, vraiment très bonne dans son exploration de fond, notamment les thématiques sur lesquelles Mike Flanagan parvient à apposer des images visuellement fortes, et une réflexion peu aisée, mais le film souffre de quelques lacunes. Le jeu de Kate Bosworth bien entendu, et un besoin parfois un peu forcé de faire de l’épouvante.
Le métrage aurait sans doute gagné à jouer d’avantage la carte du drame existentiel, avec en bonus l’onirisme maitrisé. Chercher à faire peur, pour au final dire à son spectateur ‘’nan mais oui, ça fait peur, mais c’est pas le but’’, ça plombe légèrement une œuvre qui reste quand même remarquable sur de nombreux aspect. En particulier le traitement du traumatisme, du deuil, et de la reconstruction d’un enfant de 8 ans, qui trouve dans le traumatisme de sa mère de substitution quelques clés pour progresser.
Même si le film ne fonctionne pas toujours, et possède il est vrai quelques lacunes qui viennent gâcher certaines séquences, et qu’il a du mal à fonctionner à plein régime, ça reste quand même au-dessus de la production horrifiquo/épouvante actuelle. Car mine de rien, ‘’Before I Wake’’ ne cherche pas juste à faire peur. C’est une œuvre forte, riche, et pleines de surprises. Ce qui est assez rare pour le prendre en compte.


-Stork._
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le 16 févr. 2020

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