Si vendre le film sous couverture de Drive peut amener plus de monde à le voir, ok, mais la comparaison s'arrête là. Sans compter Los Angeles et une voiture qui file dans la nuit, Night Call (Nigtcrawler de son vrai titre, parce que le français est trop bête pour chercher la signification des mots, on va lui donner des termes anglais simples) est loin de l'univers de Drive.
Suintant le cynisme, ce premier film réserve bien des surprises, que ce soit dans sa mise en scène ou dans son écriture, il arrive à imposer autant de thèmes sans jamais se perdre et à garder un impact fort grâce à son personnage principal. Lou Bloom, magistralement interprété par un Jake Gyllenhaall amaigri jouant à merveille avec son corps (comment ne pas être effrayé par ses grands yeux et son sourire), un type qui d'emblée nous est présenté comme mauvais, et avec qui le spectateur va devoir s'accoutumer, quitte à être témoin de cette personnalité sociopathe.
Si Lou Bloom se prend de passion pour les médias, ce n'est pas forcément l'argent qui attire ce voleur, mais surtout l'ambition. L'homme a trouvé son hobbie parfait pour assouvir sa destinée. Dans les moindres détails, il glace le sang, manipulant à outrance ceux qui se laissent berner, un homme qui tend un flingue plutôt que d'appuyer sur la détente en somme, beaucoup plus dangereux.
L'univers des médias est le premier visé, la mise en scène soulignant avec justesse les images crues uniquement en abyme par le biais de la caméra de Lou, je dénonce ce que vous voyez mais je vous le montre quand même. Le film ne verse pas dans le pathos et assume pleinement son cynisme par ce personnage, aucune victime n'est personnifiée. Les scènes s’enchaînent avec minutie, que ce soit dans l'attente des écoutes radio de la police, ou dans le discours choisit de Bloom pour convaincre son auditoire, en passant par un course-poursuite, chaque scène à son utilité.
Le film rend bien la machinerie des chaînes de télé américaines dans le toujours plus scandaleux, dans la manipulation des images, quitte à assouvir la peur de la population.
Images que le spectateur ne pourra s’empêcher de regarder, comme nous le faisons en regardant le film, aussi outrée qu'on puisse être par la manigance qui se joue. On reste scotché par l'ambition (l'entrepreneuriat en prend aussi un coup au passage) de chacun, le personnage de la directrice de chaîne n'est pas en reste, et le cynisme direct ne vient pas nous servir une morale mais juste une exposition des faits. Le psychopathe n'est pas uniquement le tueur en série, il est aussi à des postes stratégiques.