C'est devenu un lieu commun de troller les années 80 et le lent déclin des années 90. C'est quand même bizarre, parce que ces riantes décennies restent le terreau vif d'un nombre improbable de remakes, reboots et consort. Mais si c'était pas bien, foutez-leur donc la paix, à ces années ! Parce que là, c'est quand même mon enfance qui se fait violer régulièrement - et avec elle, celles de la plupart des trentenaires de ma génération. Une sombre, donc, qui voit revenir à l'écran la plupart des gens que nous avons aimé, traînant tristement la patte. Ici, c'est le quatuor de peintres de la Renaissance, amateurs de pizza et de ninjutsu qui débarquent pour une version améliorée de nos charmantes années 2010. Souvenez-vous de la série animée, qui narrait les aventures de nos chevaliers d'écailles et de vinyle, engloutissant des tonnes de pizza entre deux bonnes fights agrémentés de vannes. Ils avaient connu déjà trois passages par la case long-métrage, des films depuis longtemps oubliés, quand même et un salvateur retour en série animé. Je vous conseille, au passage, le dessin animé, qui revisite plein de trucs avec beaucoup d'affection. Et les voilà, comme un cheveu sur la soupe, de retour au grand écran, à peine trois mois après le fumeux Transformers 4. Je cite ce dernier parce que derrière le projet se terre encore l'image menaçante de Micheal Bay. Prends garde.

Quand j'étais pas plus haut que ça (je fais un signe, suivez un peu, merde !), mes amis et moi (donc, l'époque où j'en avais encore en vie !) avions créé une sorte de club des tortues ninjas - où, fatalement, on ne pouvait pas être plus de quatre, à moins que les nouveaux arrivants acceptent d'être Bebop et Rocksteady. Personne ne pouvait être Splinter, d'une part parce qu'être un rat n'est pas spécialement sexy, d'autre part parce qu'il était bien trop sage pour que l'un d'entre nous prétende l'être. Moi, j'étais Raphael. Non pas que je lui ressemble vraiment, mais je le trouvais cool, même si j'aurais préféré qu'il ait des Katanas aussi, ce qui aurait donné un personnage encore plus cool, la coolitude des katanas ayant été prouvé à telles reprises que plus aucun sabreur digne de ce nom n'irait utiliser autre chose, il suffit de voir Connor McLeod, qui a tout pompé sur Leonardo. Enfin, tout ça pour dire, les Tortues Ninjas et moi, c'est une vieille histoire, et pourtant, j'accepte qu'on y touche : la toute nouvelle série, par exemple, est cool, même si elle touche à des trucs plutôt essentiels, tout en les intégrant finement à l'histoire. Alors voilà, je ne suis pas un fondamentaliste, mais bon, faudrait voir à réfléchir à deux fois avant de modifier bêtement quelque chose qui fonctionnait bien jusqu'à présent.

Pourquoi je raconte ça ? Pour cette histoire de narines. Car j'en suis encore tout retourné... soyons franc. Non. Ces designs ne sont pas bien. Oui, ces designs puent. Je ne sais pas ce qui est passé par la tête des gens qui les ont conçues mais les tortues n'ont jamais été aussi horribles. Sincèrement. J'accepte plein de trucs, niveau design. Même le film d'animation de 2007 était pas terrible, mais le design était pas aussi foiré qu'ici. Là, c'est bien simple, les Tortues ne m'évoquent aucune sympathie. Et Raphael, mon préféré donc, se retrouve en espèce d'Hulk difforme, dont les bras font quatre fois la taille de ceux de ses frères. Beurk. En plus, ces narines. Des narines, frère ! Mais quel fou-furieux a pu se dire qu'adjoindre des narines aux tortues ninjas était une super idée ? A quel moment la consommation de drogue a-t-elle été si forte que les gars n'ont pas hésité à commettre l'irréparable ? J'imagine, en fait, la logique, genre, créer des tortues ninjas plus "réalistes", donc en repartant de la vraie tortue d'intérieur. Mais c'est nul. On s'en fout de la vraie tortue, c'est des tortues adolescentes, mutantes et ninjas (et d'ailleurs, même un des personnages remarque que l'association de tous ces termes est un peu foireuse !). Et encore, dans les trailers, on ne voit que l'horrible face des tortues, mais c'est ignorer la tronche de Splinter. Splinter ressemble bel et bien à un rat. Super, j'ai jamais vu un animal m'évoquer davantage d'empathie qu'un rat, ça tombe pas trop bien ? Nan mais un rat, quoi. Pas l'auguste maître d'arts martiaux, le rat, juste. Que dire encore de Shredder ? Dévoilé dans la bande annonce, son look relève plus du Robocop qui aurait durement forniqué avec Pinhead que du Maître Ninja. D'autant qu'il doit se luxer les épaules tout au long du film tellement il passe de temps à les secouer pour dégainer ses maudites lames qui se rengainent. Saloperie de gant en couteau-suisse aimanté.

A part ça, le film reprend énormément d'éléments de ses aînés, le côté frondeur de Raphael, le clan des foot qui domine la ville. Le scénario, étrangement, n'a pas beaucoup bougé depuis le vénérable premier opus, à ceci près que, 11 Septembre oblige, la menace terroriste rôde et le plan machiavélique de Shredder tient en grande partie sur un attentat terroriste. C'est au point où parfois, j'ai presque retrouvé le niveau des blagues du tout premier volet ( et non, ce n'est pas un compliment !) On rigolera bien de l'ambition, d'ailleurs, des antagonistes, qui veulent régner sur New York. C'est vrai que c'est bien, ces gens qui se fixent des objectifs à moyen terme. Dominer le monde, c'est surfait, autant commencer par une petite mégapole, comme ça, c'est fait ! On risque moins la déception, à niveler par le bas. On pourra aussi plaisanter sur les égouts de New York, apparemment conçus en chute permanente, bien qu'on se demande quand même comment ça peut fonctionner. On rigolera beaucoup moins de la paresse globale : c'est un remake vraiment au sens "jeu vidéo" du terme : c'est presque pareil qu'avant, mais en HD, remis au goût du jour. Ce qui veut dire, énormément de CGI dispensables, par exemple, qui remplacent sans grande gloire les costumes en latex pourtant parfaitement réussi des opus précédents. Ce qui signifie aussi que le clan des foots est transformé en espèce d'infanteries dans le sens le plus Call of Duty du terme et que l'on ne verra aucun de ses membres tenter un petit Ninjutsu des familles.

D'ailleurs, comme pour tous les fans, je me demandais ce qui allait réécrit par rapport à la mythologie originelle. A ce titre, je ne suis pas complètement clos, comme garçon. La nouvelle série animée - excellente - n'hésitait pas à réécrire certains pans de l'histoire, pour le meilleur. Même le tout premier film avait fait de Splinter un rat à l'origine (désolé, maître Hamato Yoshi !), qui avait appris le ninjutsu en regardant son maître (1). Bon, ok, admettons, un rat, pénard, qui apprend le ninjutsu dans sa petite cage. Eh ben, ce nouveau long-métrage va encore plus loin, puisqu'en plus d'être un rat de laboratoire à la base, Splinter a appris le ninjutsu en lisant un livre tombé dans les égouts par hasard, ce qui commence à faire un peu gros. D'autant qu'en prime, que se soit l'ancien ou le nouveau, aucun des deux métrages n'expliquent, du coup, la présence de Shredder à New York. Quand je vous dis que la nouvelle cuvée emprunte à l'ancienne... Pour le reste, étant donné que le film ne présente qu'une toute petite part de la mythologie, rien d'édifiant : l'initié ne pourra pas vraiment agresser de sa verve flamboyante le métrage sur ce sujet, dommage !

Au final, un métrage qui n'a rien de bien intéressant, si ce n'est ce fail absolu en matière de design, ôtant aux protagonistes tout intérêt ou capacité à émouvoir. Si l'on ajoute à cela un scénario qui n'a rien de bien original et des CGI abondant qui seront dépassés dans six mois et sur lequel, pourtant, reposent 95% du film, on obtient un grand moment un peu vulgaire. Ce n'est pas désagréable, c'est juste très vain. D'ailleurs, la grande question que je me pose : à qui est sensé se destiner le film ? Parce que les tous petits ne vont pas trouver grand chose d'intéressant - s'ils ne crèvent pas de trouille à l'apparition de Splinter - et les plus grands auront déjà tourné les talons en découvrant une tentative désespérée pour leurs arracher quelques deniers en surfant sur leur nostalgie. Du coup, à part les masochistes - dont je fais partie - ça laisse qui ?

(1) Correction : comme le fait remarquer le bon zombiraptor, l'origine - dans le comic-book - des tortues et de Splinter est bien celle du film, c'est le dessin animé qui a fusionné Hamato et Splinter. Et ce nouveau long-métrage reprend ainsi les origines liés au nouveau comics, en changeant un unique détail qui n'est guère gênant. Par contre, l'origine de la connaissance de Splinter en matière de ninjutsu est bel et bien changé - mais cela dit, même dans le comics (selon wikipédia, je ne l'ai pas lu encore), c'était assez tiré par les cheveux. Tout ça pour dire que le film essaie d'être proche du matériau de base (la bande-dessinée), en modifiant pourtant le design, ce qui relance la question quand même : pourquoi ? faire peur aux gamins et dérouter les vétérans ? Vraiment, incompréhensible.
0eil
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le 23 oct. 2014

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le 28 oct. 2014

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