Elevé au rang de chef d'oeuvre cinématographique grâce à l'emblématique criminel Anton Chigurh, avant d'être un western époustouflant, No country for old men est une fable. C'est l'histoire d'un monde qui se dégrade. C'est l'histoire d'un nouveau monde marqué par l'apogée d'une violence démesurée et par l'avènement du règne de l'argent au détriment de l'honneur. Dans cette nouvelle ère, nous faisons la connaissance du shérif Bell, un homme de loi intègre et malin mais désabusé et dépassé par l'explosion de la criminalité. C'est lui qui s'investit pour résoudre l'affaire de multi-homicides qui s'accumulent entre le Texas et le Mexique. Nous rencontrons également l'auteur des meurtres, le tueur accompli Chigurh. Impassible, doté d'une morale et d'un sens de l'honneur singuliers, cet assassin inspire admirablement l'effroi et la fascination. C'est quand on s'aperçoit qu'on est terrorisé par un homme à la coupe au bol qu'on se rend bien à l'évidence qu'on est en présence d'un chef d'oeuvre. Malgré ou grâce à son style atypique, Javier Bardem incarne un énigmatique tueur, un play-mobil sanguinaire qui, à l'image des figurines en plastic, semble être dépourvu de toute humanité.
Tiré du roman éponyme écrit par Cormac McCarthy, ce film est la première adaptation d'un livre à l'écran par les frères Cohen. Connus pour leur humour noir et leur amour des grands espaces américains, les frères Cohen s'illustrent ici avec brio dans un genre plus dramatique mais tout aussi rythmé. Lorsqu'un soudeur découvre par hasard une mallette remplie de billets, Llewelyn ne sait pas qu'il va hériter d'une somme conséquente d'argent mais aussi d'un lourd sac d'ennuis. En effet, l'argent est issu du trafic de drogue. Bien vite, Llewelyn devient la cible de Chirgurh, un tueur impitoyable qui va le traquer sans relâche.
Au-delà d'afficher l'un des méchants les plus bad-ass du cinéma du XXIème siècle, No country for old men regorge de nombreuses autres qualités. Le scénario astucieux a le mérite de surprendre en permanence le spectateur. Déjouant la facilité, les frères Cohen (grâce au récit de McComarthy) assouvissent notre soif de suspense dans cette chasse à l'homme à 3 dimensions. Bien qu'elle soit ponctuée de son lot de cadavres, cette traque explosive parvient à éviter soigneusement le trash gratuit. En revanche, elle nous livre des scènes cruelles comiques d'anthologie (à l'image de la scène où Antonin Chigurh ferme les rideaux de bain avant de tuer l'inconnu dans l'hôtel). Porté par une puissante tension dramatique, le film happe complètement le spectateur. L'atmosphère texane concoure à l'envoûtement et au dépaysement de celui-ci. D'autre part, le film marque par sa profondeur psychologique. Avec peu de mots, il réussit à mettre en scène de véritables questionnements philosophiques et éthiques.
Puissant et surprenant, l'un des meilleurs westerns des années 2000 !