Adam et Eve sont des vampires qui se retrouvent piégés dans ce monde qui se retrouve peu à peu vidé de son intérêt, rappelant donc les personnages bibliques chassés du jardin Eden pour errer à jamais dans une jungle sauvage et une lutte incessante pour leur survie. Et voici ce qu’est précisément la terre pour ces héros du film : une jungle où ils ont vu mourir leurs héros, leurs croyances, où ils ont su vivre heureux malgré tout mais avec un supplice lent et inévitable.
Ce supplice est représenté sous la forme d’ennui et de vide soutenu par une existence vide de sens et retranscrite dans une mélancolie agréable au regard. L’ensemble (mouvements, murmures, musique) donne un sentiment d’apesanteur. En même temps, à quoi bon aller vite quand la vie n’a pas de fin ?
Adam et Eve ont du charisme même en murmurant (car oui les vampires ne parlent pas fort, ils arrivent à se faire comprendre d’une voix tout à fait lente et faible sans se faire passer pour d’énervant originaux)
Ce film montre une bulle où sont reclus les personnages et dont on a le sentiment que le monde extérieur n’a vraiment plus d’importance pour eux, comme si toute la beauté de ce monde s’était perdu et dévoilé seulement à travers le regard d’Adam et Eve lorsqu’ils se regardent ou observent leurs propres biens (« c’est Magnifique » comme dirait Eve). Les humains se font appelé zombies par adam, comme si leur âme s’était perdu aussi.
Adam se laisse seulement porter par sa simple existence, languis sur son canapé.
Il est entouré de ses vieux objets, guitares, portraits de ces personnes qui ne sont plus ses héros, et même s’il se raccroche à ce qu’il connaît (Eve, sa musique, ses objets) il n’est plus matérialiste, on sent qu’il pourrait suffire qu’un déclic pour qu’il s’en aille et disparaisse. C’est ce qu’il veut d’ailleurs.
Contrairement au vampire traditionnel représenté, pas de profusion de sexe et de violence, ce qui est à mon sens plus crédible. Un être immortel dépasserait ce genre de chose au bout de plusieurs siècles, finirait par se lasser et préférerait l’amour éternel. Je trouve ça d’ailleurs malin d’avoir pris le parti pris de l’amour éternel qui aurait pu être risqué, mais heureusement on ressent le profond amour que les deux êtres partagent, et pas besoin de frémissement à répétition ou de gros plan sur les visages hypnotisés, c’est donc un amour qui se ressent naturellement sans matière ajouté, un amour qui dure depuis 1868, qui n’est plus très frais mais qui parais comme un verre de vin (ou de sang), meilleur après les années passés.
Pas de sexe, mais de la défonce par contre ça y est. A voir leur ravissement, le sang = meilleure drogue du monde si ça peut redonner de la chaleur aux visages les plus froids du monde.
On est donc face à des vampires qui ont tout vu, tout connu, mais qui ne sont pas non plus dégénérés, prétentieux ou à faire les malins. Pas de plan pour conquérir le monde, ils veulent rester isolés de ce monde qu’il s’en fichent à présent. Il pourrait se faire dévaster, il pourrait y avoir la guerre et des ennuis impersonnels ils auraient toujours le même état d’esprit inébranlable.
En effet, Adam est très centré sur lui-même et son désespoir.
Et pour donner un aperçu de ce qu’auraient pu être Adam et Eve plus jeune, Ava la sœur d’Eve fait son apparition en teenager insupportable, qui n’en fait qu’à sa tête et qui pense surtout à s’amuser. Malgré son caractère et ses gestes impardonnable, elle rafraîchit le tableau et parvint à faire revenir pendant un temps Eve et Adam à leur anciens démons.