Sans doute que tout a déjà été dit sur le site, depuis un mois, concernant Parasite et que toi, cher abonné, tu as déjà dû goûter à son charme vénéneux. Et tu en as fait ton film de l'année, à coup sûr.


Behind, lui, as attendu de pied ferme que le trou dans lequel il crèche soit enfin servi. Il était impatient, le masqué, d'apprécier à sa juste valeur l'unanimité. Cette unanimité qui lui a paru, dans un même mouvement, suspecte.


Pourtant, Bong Joon-ho, il a l'habitude de bien kiffer. Sa satire sociale constante, ses outcasts, sa bouffonnerie et ses cellules familiales décalées aussi. Les premières minutes de Parasite lui ont permis de rigoler des facéties et des rapines de ses personnages voisins de ceux rencontrés dans la série US Marié, Deux Enfants, avant de les voir s'engager dans une machination drôlatique tirant parti de la bêtise et de la naïveté d'une famille de nouveaux riches m'as-tu vu. Une machination qui prend des airs de véritable home invasion movie sympathique et à l'humour plus d'une fois ravageur.


Car voir cette famille prolo animée par la débrouillardise de passables branquigols en dit beaucoup tant sur la malice et la charge hargneuse du réalisateur que sur sa critique d'une Corée dépeinte en mode lutte des classes tout au long de l'oeuvre. Le film est aussi caractérisé par la quasi constante verticalité de ses mouvements et la gestion incroyable de l'espace de sa maison d'architecte claire, aux antipodes des secrets d'un script malin et de la manipulation du spectateur qui se laisse prendre avec délice dans le piège à lui tendu.


Jusqu'à ce que Parasite se transforme en chronique sociale horrifique et désespérée où, dans un même mouvement, le prolétariat s'avilit tout en se bouffant lui-même, avant de subir l'humiliation et une nouvelle forme d'esclavagisme capitaliste, culminant dans une partie de cache cache nocturne où l'on rampe littéralement, ou dans un affrontement souterrain des plus inattendus comme élément perturbateur d'un plan roulant trop bien jusqu'ici.


Avant, enfin, de verser dans la pure tragédie d'un orage brouillant les repères et acculant les protagonistes de la duperie. Et Bong Joon-ho de renouer avec ses personnages incompétents, ses institutions imbéciles et sa vision politique nihiliste.


Et à la fin de Parasite, le spectateur se rend compte, après s'être dit que l'oeuvre était juste un poil trop longue pour son propre bien, que ce qui l'enthousiasmait dans l'humour, le jeu de massacre truculent et la satire de l'entreprise s'est mué, peu à peu, en un désespoir et une illusion d 'élévation sociale proprement mortelle pour ceux qui s'en enivrent, surtout quand les maîtres ne sont pas là.


Bong Joon-ho livre donc un nouveau bijou d'une noirceur jusqu'au boutiste réjouissante, un Parasite en forme de film puzzle conciliant avec une maîtrise brillante ses accents les plus contradictoires et ses intonations les plus changeantes.


Behind_the_Mask, qui adore qu'un plan se déroule sans accroc.

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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Une année au cinéma : 2019 et Les meilleurs films de 2019

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le 29 juin 2019

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