Tous les films de Paul Thomas ont une classe folle. Mais ont parfois le défaut du maniérisme et de la stylisation à outrance qui font oublier l'essentiel de la trame narrative, en versant vers l'abstraction. Pas Phantom Thread, pourtant d'une élégance inouïe, un "produit" haute couture dont l'image, le son, la musique, le montage et la mise en scène répondent à une exigence qui frise la perfection. Mais PTA n'oublie pas pour autant son histoire, une passion trouble et vénéneuse, dissimulée sous le glamour des robes et des costumes hauts de gamme. Phantom Thread rappelle furieusement un film extraordinaire de Jacques Becker, Falbalas, portrait d'un couturier dévoré par son métier et séducteur patenté, jusqu'à ce qu'une femme différente vienne bouleverser sa vie. Il s'agit bien d'amour dans le film de PTA, toxique et a priori déséquilibré entre un génie admiré et une petite serveuse d'origine étrangère. Sauf que les rapports de force changent la donne quand la machine à en découdre se met en marche. Phantom Thread joue sur des registres subtils, avec des regards, des silences, des humiliations. C'est dans la progression de la relation entre ses deux personnages principaux (arbitrée par un troisième) que le film acquiert sa puissance de feu, souterraine, romantique et empoisonnée. Que dire encore de Daniel Day Lewis, à la veille de sa retraite (vraiment ?). Qu'il n'y a pas meilleur hommage à son talent que de lui avoir offert une partenaire de jeu qui se hisse à son niveau. L'actrice luxembourgeoise Vicky Krieps, déjà excellente dans Le jeune Karl Marx, est ici époustouflante.

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le 15 févr. 2018

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