Grotesque

« Pirates de Caraïbes » a laissé dans le cœur des cinéphiles une empreinte au parfum de chef d’œuvre. Devenant en quelque sorte le princeps du film de pirates qui avait fait la gloire d’Hollywood dans les années 40/50 avec son lot de cascades, d’humour burlesque, de fantasmagorie, de personnages hauts en couleur, sans oublier la romance en filigrane.

Le public ne pouvait donc que se réjouir d’une suite prévue sur deux autres volets. La première à voir le jour étant « Le secret du coffre maudit ». Autant poser de suite un constat, ce volet n’est pas une séquelle à proprement parler. On y retrouve bien sur tous les protagonistes et les lieux d’actions ((les mers du sud, les îles perdues, les ports infâmes où se concentre toute la lie de la société). Mais ce qui diffère, c’est le ton général.

Là où « La malédiction du Black Pearl » nous transportait innocemment et intelligemment vers des sommets de cocasserie et d’aventure, « Le secret du coffre maudit » s’affirme comme un plagiat éhonté, en moins percutant et moins surprenant. Pire encore, le scénario est franchement fouillis et brouillon. Il concentre une accumulation de scènes bricolées aux enchaînements disgracieux. Afin de combler cette pauvreté scénaristique, le réalisateur accentue l’action avec des scènes qui se veulent époustouflantes (le combat sur la roue, la valse des cages au dessus du précipice…) mais mal positionnées et se traînant lamentablement.

L’alchimie ne prend jamais. Et ni le spectateur, ni l’équipe ne sont dupes. Il fallait donc ajouter à cela des effets chocs pillés à d’autres films… Ainsi on retrouve chez Depp la même grimace de langue que dans Charlie et la chocolaterie, quand il s’agit pour lui de goûter un quelconque ver, Orlando Bloom qui lacère une voile pour mieux assurer sa descente sur le pont du bateau, scène que l’on a déjà mille fois vu !!! Ce ne sont que deux exemples, le film en est truffé !

On sent que la production a été prise de court face à l’énorme succès du premier épisode. Elle a voulu battre le fer pendant qu’il était encore chaud, mal lui en a pris ! Et ce ne sont pas les acteurs qui viendront rehausser le niveau. Johnny Depp est rangé au titre de guest star, et c’est tant mieux car il est à la limite de parodier son personnage. Orlando Bloom est insipide et donne à son rôle la profondeur d’un mollusque et Keira Knightley ne dépasse guère le stade de l’anémone de mer, elle se laisse porter par le courant mauvais.

Disney nous offre généreusement 2h30 d’un profond ennui, sauvé toutefois par l’univers de Davy Jones et ses « poissons pirates » donnant droit aux meilleures scènes du film. C’est tellement peu que cela en devient énervant. Tant est si bien que l’on ne donne même plus l’envie de découvrir le trois dont Verbinski annonce déjà qu’il l’a tourné dans l’urgence sur un scénario écrit au fur et à mesure. Ca promet !