Comme le titre ne l'indique pas, Revenge est un film français. Pire encore, c'est un film français de genre, à savoir un Rape and Revenge. C'est surtout la première réalisation de Coralie Fargeat, qui en est aussi la scénariste. Une femme mettant en scène ce type de film, cela nous offre la possibilité d'avoir un regard différent sur la victime et ses agresseurs, de modifier un peu les codes et de nous surprendre.
Dans un lieu désertique, un hélicoptère atterrit devant une demeure luxueuse. Une jeune femme (Matilda Lutz) se cachant derrière des lunettes de soleil, en descend avec une sucette à la bouche. Elle fait immédiatement penser à la Lolita de Stanley Kubrick. Dans l'imagerie collective, elle est un fantasme pour un homme d'âge mûr, en l'occurrence Richard (Kevin Janssens), qui l'accompagne en ce lieu de luxure, loin des regards indiscrets. C'est un richissime homme d'affaires, mais c'est aussi un mari et un père, s'offrant un moment de détente avec sa bimbo. L'arrivée impromptue de deux autres hommes d'affaires, Stan (Vincent Colombe) et Dimitri (Guillaume Bouchède), va faire basculer ce séjour idyllique, en un cauchemar pour la jeune femme. Après avoir été violée, puis laisser pour morte, elle va affronter ces trois mâles jusqu'à la mort.
Cette première oeuvre est visuellement maîtrisée. La réalisatrice Coralie Fargeat ne fait pas dans la dentelle, son but étant de malmener le spectateur, de le mettre mal à l'aise face à ces corps en souffrance. Ce qui est dommage, c'est que son ton n'est pas différent des œuvres du même genre : L'ange de la vengeance (1982), I Spit on your grave (2010, pas encore vu l'original) ou encore La dernière maison sur la gauche (1972). Elle reprend le même schéma classique dans un style clipesque, ne se révélant pas si désagréable. Malheureusement, elle force le trait à coups de symbolismes avec cette pomme que la jeune femme croque, finissant par pourrir comme la situation au sein de cette luxueuse demeure coupée du monde, où l'animalisation des personnages, le mâle devenant un lézard à la langue baveuse et perverse, alors qu'elle devient un aigle.
En une nuit, les rôles s'inversent. Après avoir retiré la branche d'arbre de son abdomen; subtile métaphore phallique; puis de cautériser la plaie en étant sous acide avec une canette de bière (l'alcool et la drogue, peuvent vous sauver la vie...). Elle arbore le tatouage d'un aigle aux griffes acérées, symbolisant son passage de proie à chasseuse. De blonde, elle devient brune donc forcément plus badass (sic). Elle peut se mettre en chasse des deux connards restants, cool.
Cette histoire de vengeance ne fait pas dans la finesse, ni ne se veut réaliste. La structure narrative est simpliste : viol, complicité, violence, traque et inversion des rôles. De ce fait, la psychologie est portée disparue. C'est un survival, se limitant à tuer ou être tué, point. Ce côté primaire pourrait être jouissif, si les rares dialogues n'étaient pas aussi insipides, voir débile. L'adage "plus c'est con, plus c'est bon" ne fonctionne pas du tout dans ce sublime paysage désertique. Alors que le film frôle plusieurs fois le ridicule, il va finir par y plonger et se noyer dans un flot discontinu sanguinolent, arrachant des rires nerveux aux spectateurs, finissant par être épuisés par tant d'incohérences et de facilités.
C'est long, mais pas ennuyeux. On est en empathie avec Jen (sans les hologrammes, mais avec la boucle d'oreille rose en forme d'étoile), mais comment ne pas l'être avec la victime d'un viol se retrouvant face à trois primates libidineux. Bien sur, on s'esclaffe intérieurement dès qu'elle ouvre les yeux, alors qu'elle vient de faire une chute de plusieurs mètres en s'empalant sur une branche d'arbre. On s'amuse aussi de la voir perdre des litres de sang, sans que cela l'affecte vraiment. De même, on se demande quel chemin ont pris ces trois connards, pour que la nuit tombe aussi vite, pendant qu'ils descendaient sur le lieu de leur crime. Ce n'est pas évident de mettre de côté cela, tellement c'est gros. Mais Coralie Fargeat semble avoir eu envie de torturer ses personnages, en faisant traîner son oeuvre, grâce à de longs affrontements, où les plaies sont béantes et sanguinolentes.
Rien de neuf sous le soleil de ce film de genre. La jeune femme a mis le spectateur(trice) en émoi en tortillant ses divines petites fesses dont la caméra s'en est délectée, encore et encore. Son connard d'amant a exhibé son micropénis sous nos yeux moqueurs, ce qui explique sa violence (il faut bien compenser). On a vu des litres de sang se déverser, en se demandant comment ils vont ravoir la moquette blanche.
Ce n'est pas dégueulasse pour une première oeuvre, surtout pour un film de genre dans lequel le cinéma français ne brille pas vraiment. Mais cela reste une oeuvre quelconque, ne sortant pas du lot. Finalement, que cela soit mis en scène par une femme ou un homme, le résultat reste le même. Nous pouvons donc en déduire, que nous sommes tous égaux, enfin sauf au niveau des salaires, mais ceci est une autre histoire.