Un sacré morceau que ce Scarface ! Aujourd'hui complètement culte, totem de la pop culture, influence mâchée et digérée à droite et à gauche, le film a finalement éclipsé la version originale et semble désormais indéboulonnable de la figure du gangster ancrée dans l'imaginaire collectif. Trente-sept ans après sa sortie américaine, que reste-t-il aujourd'hui à en dire ? Rien, certainement. Qu'importe ! à mon tour d'apporter ma pierre à l'édifice.
Scarface est un film avec lequel j'étais, avant même de le découvrir pour la première fois il y a dix ans de cela, assez familiarisé d'une certaine manière : GTA 3 puis plus tard Vice City furent deux des jeux phares de mon enfance. Sorti dix-huit après le film, le premier recycle toutes les meilleures chansons de sa bande-son (sur sa station Flashback FM, sur laquelle je ne manquais pas de scroller une fois rentré dans une nouvelle voiture) quand le second s'approprie lui son imagerie et son climax. Alors forcément, un GTA-le-film, sur le papier, ça ne pouvait que me botter. Mais encore fallait-il que le film n'ait pas que cela pour lui. Ce qui - Dieu merci - n'est pas le cas. Loin s'en faut.
Et histoire de mettre les choses au clair dès le début, le film démarre avec ce générique d'ouverture absolument terrible - que je tiens pour un petit chef-d'œuvre en soi - alternant images (que j'imagine authentiques) d'exilés cubains lors de l'exode de Mariel et cartons à police rouge sur fond noir (c'est tout con mais super classe), le tout sur la musique absolument légendaire de Giorgio Moroder... Parfait, juste parfait. Sans conteste l'un de mes génériques préférés.
Puis c'est ensuite parti pour 2h45 de rise and fall dans le milieu des trafiquants de drogue. Un programme toujours alléchant ma foi - surtout quand il s'avère aussi bien emballé. C’est en effet peu dire que la mise en scène de Brian De Palma y est plutôt virtuose (ce qui n'étonnera personne je pense) : c'est grandiose, toujours lisible, il y a des zooms et des travellings d'enculé... bref, c'est généreux au possible et ça aligne les morceaux de bravoure. Je prends mon pied.
Tout ça bercé, donc, par les musiques et chansons écrites par Moroder, toutes aussi entraînantes les unes que les autres. Et par ses décors magnifiques. Et par son casting quasi-impeccable. Et à un rythme tout à fait soutenu. Inutile dès lors de préciser que le film passe comme une lettre à la poste...
En fait, le seul défaut que j'ai à reprocher au film, c'est son personnage principal, Tony Montana, qui est vraiment un sale trou du cul (je ne pense pas qu'il soit nécessaire de développer). Et c'est ce qui fait que je n'apprécierai certainement jamais autant le film que j'apprécie L'impasse ou bien les trois Parrains (pour citer les deux autres grands rôles de truands incarnés par Al Pacino). Parce que contrairement à Carlito Brigante et à Michael Corleone, auxquels je m'attache, je ne ressens absolument aucune empathie pour Tony Montana (pas aidé par l'interprétation d'Al Pacino, qui en fait vraiment des caisses et frôle à deux trois reprises le ridicule). Du coup, son destin tragique ne m'émeut pas. Sans aller jusqu'à dire que c'est mérité, le mec m'est trop antipathique pour que son sort me fasse de la peine. Et du coup, manque à l'appel ce petit déchirement que je peux ressentir à la fin de L'impasse ou du Parrain III. Et qui en fait des films vraiment parfaits.
Mais bon. Loin de moi l'idée de le dénigrer, ce Scarface n'en reste pas moins un sacré morceau de cinéma, qui m'impressionne un peu plus à chaque visionnage. Et dire que De Palma et Pacino feront encore mieux dix ans après avec L'impasse (chef-d'œuvre absolu, celui-ci)...