Une version romancée de la vie d’Edward Snowden qui pose les bonnes questions sur les abus en matière de surveillance orchestrés par les institutions de nos états modernes.


En 1971, en pleine guerre du Vietnam, le New York Times publiait les papiers du pentagone, un rapport officiel et confidentiel très critique envers la politique Américaine avant et durant la guerre. Les documents avaient été livrés au magasine par Daniel Ellsberg, un ancien analyste de Washington. Son geste divisa l’opinion, certains le voyant comme un héros, d’autres comme un traitre à son pays. 32 ans plus tard, l’histoire se répéta quand Edward Snowden dévoila au monde l’étendue de la surveillance mise en place par les divers services secrets de son pays dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme » déclarée par George W. Bush. Et si Daniel Ellsberg s’est depuis vu plus ou moins réhabilité, le cas d’Edward Snowden demeure à ce jour très controversé aux États-Unis.


Le film qui lui est consacré se passe à Hong Kong, en 2013. Edward Snowden (Joseph Gordon-Levitt) y rencontre les journalistes Glenn Greenwald (Zachary Quinto) et Laura Poitras (Melissa Leo). Sous la caméra de cette dernière, il raconte son passé et ce qui l’a amené à abandonner une vie confortable au service des institutions de son pays.


Le retour d’un Oliver Stone motivé


L’histoire de Snowden est du pain béni pour le réalisateur Oliver Stone. L’ancien scénariste s’est fait une spécialité de traiter des sujets politiques les plus polémiques de l’histoire des États-Unis moderne. Toutefois, ses dernière réalisations dans ce registre n’avaient pas vraiment marqué les esprits comme avaient pu le faire en leur temps JFK ou Nixon. On pouvait donc craindre que le feu sacré ait quitté Stone et que son Snowden ne soit pas à la hauteur de son plein potentiel. Heureusement, il n’en est rien. Le sujet semble l’avoir inspiré et il signe là un de ces meilleurs films depuis longtemps.


Hagiographie inspirée


Évidemment, Stone a choisi son camps et considère Snowden comme un héros. Il n’en demeure pas moins que la description qu’il donne de son parcours et de sa psychologie sonne juste. Jeune homme traumatisé par les attentats du 11 septembre, il veut servir son pays et intègre pour cela les services secrets. Plutôt favorable aux différentes mesures officielles prises par les leaders de son pays après la destruction du World Trade Center, il se met de plus en plus à douter de la justesse de sa cause quand il voit l’étendue des mesures de surveillance effectuée dans la quasi-illégalité et servant des intérêts sans grand rapport avec la menace terroriste. Son histoire d’amour avec Lindsay Mills s’intègre bien dans le récit, le personnage en ressort plus humain sans que cela ne parasite le message principal développé par le film. Servi par une interprétation de qualité et une réalisation à la fois moderne et élégante, Snowden est un beau plaidoyer contre les abus gouvernementaux de toute sortes et une apologie touchante de ceux qui osent se dresser contre eux.


Hong Kong, entre hôtels de luxe et appartements prisons


La partie Hong Kongaise sert de liant entre les différents flashbacks illustrant le passé du jeune ingénieur. Elle respecte dans les grandes lignes la réalité de ce qu’a été le séjour de Snowden dans la ville. Et si toutes les scènes dans la chambre d’hôtel ont probablement été tourné en studio à Hollywood (le packaging très américain des plats à emporter asiatique que mangent les protagonistes le trahit), les extérieurs à Tsim Sha Tsui, autour du Mira sont tout ce qu’il y a d’authentique. Le métrage permet également de mieux saisir ce qui s’est passé entre le moment où Snowden quitta son hôtel et prit l’avion pour Moscou : il fut confié par son avocat à la garde de réfugiés (dont les extérieurs de l’appartement furent tournés à I-Feng Mansions déjà mis à contribution pour le Contagion de Soderbergh et le Transformers 4 de Michael Bay). Alors que ces derniers sont régulièrement victimes d’attaques médiatiques de la part des politiciens pro-gouvernementaux, il est intéressant de les voir décrit ici sous un jour nettement plus humain et flatteur.

Palplathune

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