Somewhere est ultra divisé. Voilà un film qui partage... Lion d'or à Venise, 5,5 de moyenne sur senscritique ! Ca surprend.

Je suis allé le voir sans à priori, en ayant vu de Sofia Coppola que l'excellent Lost In Translation. Bien m'en a pris, car, personnellement, j'ai adoré.

Il faut bien évidemment remettre ce film dans un contexte bien précis. Le cinéma de Sofia Coppola, que vous en ayez vu un seul de ces films ou tous, est toujours le même. Des gens riches, perdus, désabusés, qui s'ennuient... Si dans Lost In Translation la narration ne suit qu'à moitié l'ennui des personnages cités, mais tente aussi de souligner le décalage permanent avec la société Japonaise, dans Somewhere, Sofia Coppola n'a que ça à montrer. Et elle le montre bien !

Bien évidemment il ne faut pas s'attendre à ce film de nous montrer une montagne de péripéties, mais finalement, c'est bien là tout l'intérêt. Le cinéma n'est pas qu'un scénario + une mise en scène, c'est bien plus que cela. On est là dans l'abstraction de l'action, le film nous amène simplement à vivre quelque chose, un moment, un sentiment. Certains diront que la mise en scène de Coppola ne suit pas, je ne serais pas d'accord, car même si dans l'ensemble on contemple en effet bon nombre de plans "classiques", l'ambiance générale et la photographie font tout. J'aurais pratiquement trouvé inadapté une mise en scène astucieuse, pleine de travellings et de plan-séquences interminables, ou originale... Le thème est tellement terre à terre, simple, réaliste, que ça aurait été d'un autre genre d'y mettre une mise en scène de ce type.

J'avais lu dans une critique, je ne sais plus vraiment où, que le cinéma de Coppola n'était qu'une playlist. Ce n'est pas totalement faux. Somewhere pourrait se voir sans ordre chronologique. Les moments sont éphémères, de simples instants de vie. Mais c'est justement ce qui est génial.
A ce niveau, Somewhere est d'une profonde sincérité. On se doute que ce thème, déjà évoqué dans d'autres films de Coppola, mais là encore plus, de la vie de star, et de la relation père-fille à ce niveau là, est autobiographique. Car pour ceux qui ne le sauraient toujours pas, Sofia Coppola est bien sûr la fille de Francis Ford Coppola ! Wahou !
Et donc on peut aisément deviner que ce film a une grande part autobiographique, ce qui rajoute d'ailleurs à la narration une incroyable sincérité.

Car c'est bien ce qui m'a frappé dans Somewhere. Le film est pur, simple, évident. Bien sûr tout le monde ne vit pas comme Johnny Marco, au contraire, mais chaque sujet, chaque instant, chaque endroit, est croqué avec une simplicité exemplaire. Et finalement on a presque l'impression d'avoir suivi Stephen Dorff et Elle Fanning a travers l'hôtel Marmont, à la patinoire, on a presque l'impression d'avoir joué avec eux à Guitar Hero. C'est fort.

Stephen Dorff et Elle Fanning, parlons-en. Voilà des acteurs que je ne connaissais pas, ou très peu, et que j'ai découvert grâce à ce film. Et ils sont vraiment bons. Encore une fois Sofia Coppola montre à quel point elle sait choisir ses acteurs. Ce n'est pas forcément qu'une question de talent, mais à chaque fois on a l'impression que le rôle a été écrit exclusivement pour chaque acteur. Bill Murray et Scarlett Johansson semblaient être nés pour jouer dans Lost In Translation. Ici, Stephen Dorff est parfait, dans ce rôle un peu désabusé (un peu...) de la star grandiose qui ne sait que faire... Et Elle Fanning prouve qu'elle a un grand avenir ! Superbe distribution !

La musique comme d'habitude est très bien choisie, ça rejoint l'idée de playlist citée précédemment, et ce n'est pas un reproche. I'll Try Anything Once des Strokes est de toute beauté au sein de l'histoire... De manière générale, c'est l'ambiance qui a été retranscrite de façon parfaite. Un vrai travail sur les lumières, les sons. J'aime beaucoup les films dans lesquels vous vous sentez toujours dans le récit, dans l'endroit, dans l'instant, grâce à une ambiance réussie. Et bien en voilà un.

Donc pour conclure, et parce que parler d'un film du genre pendant 2 heures n'est pas forcément facile, Somewhere m'a convaincu. Il n'a pas la puissance émotionnelle de Lost In Translation, mais il m'a conquis grâce à une réelle honnêteté, une simplicité remarquable, et surtout grâce à cette ambiance si particulière, alliée à un récit peu fascinant mais finalement passionnant, qui font que j'ai eu l'impression en sortant du cinéma d'avoir vécu avec eux ces instants privilégiés.
Le cinéma n'est pas seulement fait d'action, de scénario, sinon autant écrire un livre. Coppola a réussi à faire tout avec du rien, et c'est génial.
Ripailloux
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le 7 janv. 2011

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