Spotlight s'inscrit tout droit dans la veine des films d'investigation journalistique (Le grand chantage, Les hommes du président, Good night and good luck...). On suit point par point l'enquête menée en 2001 et 2002 par un quatuor de journalistes du Boston Globe, que leur nouveau directeur a envoyé sur la piste d'un prêtre catholique violeur.
De fil en aiguille, ils découvrent que la réalité est bien pire, à savoir que non seulement, le prêtre violeur était loin d'être seul et que l'autorité écclesiastique elle-même à étouffé la chose.
Une fois publiée, l'affaire provoque évidemment un scandale, suscitant une vague de témoignages qui viennent alimenter le procès général d'une Eglise doublement criminelle.
Le film lui-même est bien mené, sans artifice ni effets de manches; les acteurs ne sont pas là pour se faire valoir ou démontrer quoi que ce soit. Leur psychologie n'apparaît que par bribes, et c'est assez reposant dans un paysage audio-visuel plutôt hystérique. En fait, sous ses dehors grisés (curieuse photographie de Masanobu Takayanagi), Spotlight est un film courageux, qui s'attaque à l'un des plus vieux monstres de l'Occident: l'Eglise catholique.
Ce que le film ne dit pas, parce que l'Amérique est un peu myope en-deçà du 18e siècle, c'est que les procès pour viols contre des prêtres catholiques existent depuis.. au moins cinq cents ans, et sans doute depuis l'instauration du célibat au cours du Xe siècle. A l'aube du protestantisme, les procès pour viols étaient même si nombreux que le pape Paul III lança un "concours" auprès de ses cardinaux pour qu'ils trouvent un moyen de minimiser la gravité de la situation. Et c'est ainsi que Charles Borromée inventa le confessionnal, une boîte dans laquelle on enfermait le curé à clé, afin qu'il ne puisse plus se jeter sur ses ouailles.
Les monstres sont toujours lents à abattre. Spotlight est un flocon de neige qui vient de se poser sur un énorme iceberg en espérant le désagréger; autour, d'autres icebergs tout aussi monstrueux flottent encore, chacun formé des crimes de sa religion, qu'aucune cour internationale n'aura jamais le courage de reconnaître pour ce qu'ils sont. Pourtant, il existera bien un flocon qui fera tout basculer un jour. Pourquoi pas un simple film?