A priori, on tient de la photocopieuse pour ce qui est de la trame principale. On retrouve peu ou prou les mêmes éléments, à savoir notre couple composé d’un personnage masculin belle gueule introverti, d’une belle femme un tantinet provocante, un ancien petit ami beau gosse qui veut retenter sa chance, un chef de meute alcoolique et un attardé méprisé par toute la communauté (il se fait régulièrement virer des endroits publics). Tout ça s’enchaîne, et culmine jusqu’à l’inévitable affrontement. Pas de quoi révolutionner l’original, donc. Cependant, les principales qualités du film sont dans le traitement et le dépoussiérage de l’histoire. A une belle femme au foyer, on préfère ici une actrice de série télé, que tout le monde en ville a vu. L’optique poursuivie par le film est simple : à la logique communautaire des petits villages, il privilégie une approche ultra beauf. L’ancien père de la vieille famille du village est remplacé par un entraîneur sportif qui est pour beaucoup dans l’animation de la vie de la ville, mais qui a un sévère penchant pour l’alcool et des tendances agressives. Et nos deux personnages ayant plutôt un beau train de vie, de fréquentes petites agressions morales à propos de pauvreté viennent émailler les dialogues (ils sont d’ailleurs suffisamment bien géré pour qu’on saisisse le mépris qu’il y a derrière, sous-entendant que nos riches se moquent de leur pauvreté). Ainsi, la fête du village est remplacée par un match de soccer où tout le monde se retrouve à gueuler dans les gradins et à huer le camp d’en face. Le bar se partage essentiellement entre beaufs et red neck (la chasse est principalement vue sous cet angle : bières et fusils). Toutefois, le contexte religieux bénéficie d’un moindre développement. Au pasteur véritablement agaçant de Peckinpah (qui s’introduisait chez notre couple pour leur dire bonjour, et qui en profitait alors pour quêter et salir la science qui fait reculer la religion), le film préfère une sobre scène de messe où le mari préfère se retirer, avant d’être pris à parti par nos red neck en costards du dimanche qui trouvent sa conduite irrespectueuse. Ce traitement est assez subtil, puisqu’il ne vise alors plus à descendre la religion, il pointe directement vers la débilité et le vide de nos villageois qui cherchent tous les prétextes pour le rabaisser (« Croyez vous que Dieu a aidé les ruscofs pendant la guerre ? » Ne sachant pas quoi répondre, David rigole « Pourquoi ça vous fait rire ? »). Un petit recul est toutefois à noter dans la gestion du couple. Là où Peckinpat introduisait de la tension dans leur relation (Amy y allait de sa provocation « féminine » puisqu'elle était la principale victime, c'était la seule arme qu'il lui restait) alors que David se conduisait comme un couard), le couple de cette nouvelle version est un peu plus soudé, en tout cas plus harmonieux (Amy est d’ailleurs moins provocatrice malgré ses shorts très courts, qui s’inscrivent bien dans ce paysage beauf). Du début jusqu’à la fin, le traitement opéré est impeccable, et le film ne cède jamais à la violence gratuite, si ce n’est un peu vers la fin où l’exécution du flic est un peu facile. Mis à part ce léger défaut, le film use d’un gore modéré plutôt efficacement géré, et la tension psychologique est palpable. Finalement, ce Chiens de paille 2011 est une relative bonne surprise, et pourrait être aux Chiens de paille ce que Funny Games US est à Funny Games. Rien à dire sur l’interprétation efficace de nos acteurs, qui ont tous bien compris leur rôle. On notera la petite prestation efficace de James Woods en coach d’équipe.

Voracinéphile
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le 29 janv. 2016

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