Il me semble que le film est souvent prisonnier de son lourd sujet, cette affaire d’enfants échangées à la maternité qui ressurgit six ans plus tard. La forme est beaucoup trop corsetée et fonctionnelle pour véritablement faire éclater cette double émotion père/fils que le film aurait dû creuser en priorité. On aurait davantage aimé plonger dans cette seconde famille plutôt que dans ce procès de l’infirmière, relativement superflu. On avait pourtant tout pour se recentrer entièrement sur l’issue tragique que cela provoque sur les deux familles. Néanmoins, ça m’a sacrément secoué. Si Rohmer était le cinéaste des femmes, Kore-Eda semble être celui des enfants. De Nobody knows à I wish il est évident d’y voir dans l’enfance (et plus largement dans le dysfonctionnement familial) son champ d’investigation primordial. L’intérêt de ce nouveau cru est de questionner la génétique. Et si le film fait le pari de suivre en premier lieu la famille de Keita c’est essentiellement pour faire le portrait d’un père, obsédé par la réussite professionnelle, la sienne autant que celle future de son fils, qu’il va peu à peu remettre en question au contact forcé de cette famille à la vie nettement plus modeste, qui renferme son fils de sang et dégage un bonheur familial plus concret. Qu’en est-il de la transmission ? Qu’en est-il du lien affectif dans l’étirement de la temporalité ? Qu’en est-il de la notion si complexe d’éducation ? Le film suggère tout un tas de réflexion ; Et s’il tient beaucoup du montage alterné, souvent accompagné d’une petite musique au piano un peu trop séductrice, entre l’appartement clinique de Ryota d’un côté et celui beaucoup plus ouvert de Yudai de l’autre, c’est dans la relation sourde des deux pères que Tel père, tel fils trouve ses meilleurs instants. Qui plus est lors de ce final, très ambigu (et quasi utopique dans l’évolution intime de son personnage) qui semble vouloir réunir tout le monde.

JanosValuska
7
Écrit par

Créée

le 7 juil. 2016

Critique lue 188 fois

JanosValuska

Écrit par

Critique lue 188 fois

D'autres avis sur Tel père, tel fils

Tel père, tel fils
Sergent_Pepper
7

Autorisation (trans)parentale.

Le cinéma asiatique semble avoir un don propre à sa culture, (que, je le confesse, je connais assez mal) qui consiste à dire beaucoup dans la pudeur. Dans un milieu où il n’est pas commun de formuler...

le 12 mai 2016

57 j'aime

6

Tel père, tel fils
Gothic
7

En-cas d'urgence, brisez la glace

13h35: quelques minutes seulement avant le début de la projection, PFloyd, Noménale et moi nous retrouvons devant le ciné. Je suis presqu'en retard, on dirait mon père. Ambiance légère, quelques...

le 20 janv. 2014

49 j'aime

24

Tel père, tel fils
Gand-Alf
8

L'échange.

Prix du jury à Cannes en 2013 et présenté dans de nombreux autres festivals, "Tel père, tel fils", le nouveau film du japonais Hirokazu Kore-Eda, raconte l'histoire de deux familles au statut social...

le 16 janv. 2015

45 j'aime

1

Du même critique

Titane
JanosValuska
5

The messy demon.

Quand Grave est sorti il y a quatre ans, ça m’avait enthousiasmé. Non pas que le film soit  parfait, loin de là, mais ça faisait tellement de bien de voir un premier film aussi intense...

le 24 juil. 2021

31 j'aime

5

La Maison des bois
JanosValuska
10

My childhood.

J’ai cette belle sensation que le film ne me quittera jamais, qu’il est déjà bien ancré dans ma mémoire, que je me souviendrai de cette maison, ce village, ce petit garçon pour toujours. J’ai...

le 21 nov. 2014

30 j'aime

4

Le Convoi de la peur
JanosValuska
10

Ensorcelés.

Il est certain que ce n’est pas le film qui me fera aimer Star Wars. Je n’ai jamais eu de grande estime pour la saga culte alors quand j’apprends que les deux films sont sortis en même temps en salle...

le 10 déc. 2013

27 j'aime

6