Avec ce visionnage qui date déjà de 10 jours je n'arrive pas à savoir pourquoi j'ai apprécié, mais sans le plaisir ressenti avec les précédentes réalisations de Christopher Nolan. Il y a déjà des points qui font que j'ai un début d'explication au ressenti mitigé de cette production. C'est pourquoi je m'attaque à l'écriture de cet avis pour moi-même m'y retrouver. Il n'est donc pas impossible qu'à la fin de ma réflexion, cette introduction n'ai plus aucun sens.
Note : Cette réflexion est vierge des théories et avis que l'on retrouve sur la toile. Je m'y attèlerai une fois mes idées et interrogations plus claires.
Déjà ce qui est fortement "barbant" (oui, oui ce mot est encore utilisé au XXIème siècle) c'est la fausse complexité du film, de certaines parties explicatives plus précisément, qui passe par des chemins trop alambiqués pour arriver à un quelque chose que l'on devine plus simple après réflexion. Si vous n'avez rien compris au film, c'est peut-être qu'il n'y a rien à comprendre de plus. Future, présent, inversion de timeline pour les événements pas encore arrivés, point barre. C'est une extrapolation, mais dans le fond c'est l'idée. Du moins c'est le ressenti à la fin du long métrage pour un premier visionnage. Là où il y aurait concrètement fallu apporter du détail et de la substance, c'est dans les personnages. Et pourtant...
Pour encore moins rentrer dans cette histoire, il y a Le protagoniste. Direction voulue par Nolan ou interprétation limitée de J.D. Washington ? Quoi qu'il en soit, ce personnage est dénué d'émotions et de personnalité. Il est censé découvrir une facette nouvelle du monde et ne réagit pourtant à rien de ce qui l'entoure. Cela rend le personnage limite "rasoir" (c'est aussi un poisson de la famille des carpes) et ramollis drastiquement le rythme et l'intérêt qu'on pourrait lui porter du la longueur. A la limite le personnage joué par Robert Pattinson est plus intéressant, car amenant une énergie bienvenue dans des séquences parfois assez linéaires. Alors oui, dans la narration ça a du sens, mais de manière générale ce contraste des personnalités pose problème surtout lorsque l'intrigue ne se concentre que sur Le protagoniste.
Paradoxalement, l'aspect film d'espionnage est excellemment bien géré avec son personnage impassible. L'immersion y est palpable dans ce genre de séquences d'investigations. Mais avec cette composante futuriste plus ou moins inédite pour Le protagoniste, sa composition devrait aller dans le sens de ce genre de découverte assez inimaginable. Donc réagir physiquement face à l'inconcevable, c'est un minimum. C'est pas tous les jours qu'on peut distordre le présent avec le future, ou je me trompe ?
Et il y a aussi la partie action avec effet présent/futur, avant/arrière. On en parlait comme d'un nouveau palier de l'aveu même du réalisateur Dans les faits, c'est trop basique, trop déjà vu, trop peu spectaculaire par rapport au sujet à portée mondiale du film :
Le futur entre en guerre contre le présent, c'est pas du plantage de navet quoi.
De fait, ces séquences rajoutent à l'aspect mollasson du long métrage. Sans vraiment parler de "mollesse" soyons honnête, parlons plutôt de "manque d'investissement émotionnel du spectateur (que je suis) devant Tenet et son action". Si ce n'était la composition rythmée et tonitruante de Ludwig Göransson (Creed, The Mandalorian, ...) qui joue sur les sons, les bruitages, rewind et cie, les scènes d'action n'auraient clairement pas eu la même portée.
Ce manque d'investissement ressenti pose le vrai problème. Au contraire de certains films de Nolan, les questions soulevées ne semblent pas aussi pertinentes que celles de certaines précédentes œuvres de sa filmographie. Les problématiques du temps, de l'avenir, ... sont ici plus basiques et peut-être un peu moins maîtrisées que par le passé. Il y a une forme de laisser aller narratif que jusqu'ici Nolan avait relativement su éviter. Cependant, cette thématique du temps dans Tenet trouve son véritable intérêt en la replaçant dans le contexte du cinéma de Christopher Nolan. Il y a peut-être quelque chose de complémentaire dans la manière dont le temps et/ou la chronologie sont traités entre Interstellar, Dinkerk, Insomnia ou encore Memento. A creuser.
Pour conclure et malgré de nombreuses interférences problématiques, Tenet reste une œuvre appréciable. Bon déjà parce qu'on ne s'y fait pas chier, et ça c'est une prouesse pour un blockbuster de plus de 150 minutes, mais aussi parce que techniquement le film est maîtrisé. La composition des plans, la bande originale, le parallèle entre ce qui arrive est ce qui va arriver, la photographie, ce côté réaliste de l'univers, de l'action ... tout semble ancré dans une réalité palpable qui constitue un des seuls points d'accroche de l'investissement du spectateur dans cette histoire de fin des temps.
Et c'est pourquoi mon envie de revoir le film et d'essayer d'en comprendre ses intentions artistiques (et thématiques liées à l'ensemble de l’œuvre de Nolan) fait de Tenet un film fort intéressant à analyser, mais prisonnier des obsessions de son grand metteur en scène.