Bien m’en a pris, je ne savais absolument pas ce que j’allais voir avant d’entrer dans la salle de cinéma. Certes, l’affiche et le titre du film annonçait clairement la couleur mais j’ignorais tout de l’histoire. Totalement vierge, je me suis laissé envoûté avec un certain plaisir par le pouvoir attractif de cet humble thriller horrifique qui joue plutôt bien avec les attentes du spectateur.


La première partie qui pose les enjeux a en effet tout de suite éveillé mon attention. Greta, une jeune américaine un peu naïve par instant mais plutôt bien interprétée par Lauren Cohan (abonnée aux séries, on a pu la voir surtout dans The walking dead, mais aussi dans Supernatural, Vampire diaries, Chuck ou encore Archer, etc), débarque dans une imposante et inquiétante demeure anglaise pour décrocher un job. Fuyant son pays natal pour une raison qu’on ignore encore, elle fait la connaissance d’un vieux couple qui désire engager une nourrice pour s’occuper de leur enfant unique Brahms. Quelle ne fut pas sa surprise quand elle découvre que l’enfant en question est une simple poupée au visage de porcelaine ! (encore une fois, n’ayant pas lu le résumé et vu dans ce contexte, la découverte de la poupée m’a autant surpris qu’effrayé).


Déconcertée mais intriguée, elle écoute attentivement les conseils de sa patronne qui lui annonce ses tâches domestiques et éducatives le plus sérieusement du monde, comme si la poupée était un simple être humain. C’est là ou le film parvient à tirer son épingle du jeu. Plutôt que de poser des ambiances anxiogènes et de glisser de ci de là des scare-jumps aux effets éculés, la caméra de cinéaste pose d’abord son oeil sur ses personnages, ce qui lui permet d’installer une tension psychologique particulièrement bien dosé. Le spectateur se prend alors au jeu et se pose une multitude de questions sur les événements qui viendront troubler la vie quotidienne de Greta qui commence à douter sur la nature du « boy ».


On a beau se trouver, à de nombreuses reprises, face à une poupée ordinaire, la magie noire du cinéma opère à chaque plan fixe sur Brahms qui, malgré le fait qu’il soit immobile, nous semble bien souvent vivant. Je me suis régalé à la fois du montage méticuleux et de la force de suggestion des plans qui stimulent sans arrêt notre imagination. Pas de doute, le cinéaste connaît bien son métier de metteur et scène et s’efface subtilement derrière le simple pouvoir des images qu’il agence toujours avec précision.


Jouant avec le hors champ, c’est en effet le fantasme même du spectateur qui nourrit sa propre peur. Nous découvrons les phénomènes en se demandant toujours s’ils sont d’ordres surnaturels ou pas. On se pose alors mille et une questions dans la pénombre suffocante de la salle. On a également une grande empathie pour Greta qui s’adapte comme elle peu et agira toujours avec beaucoup d’humanité envers Brahms. Nos questions permanentes s’entremêlent avec des sentiments de purs frissons et j’avais hâte de connaître le fin mot de l’histoire. Et c’est là ou The boy trouvera ses limites …


La réalisation portant le film sur ses épaules, j’enrageais, dans l’ultime quart d’heure, contre les scénaristes qui ne se sont pas trop foulés sur la révélation. Si elle est loin d’être complètement loupée, la déception ira crescendo jusqu’au générique. Refusant de nous laisser avec toutes ses émotions troublantes, les auteurs n’ont pas eu l’audace d’aller jusqu’au bout de l’ambiguïté (ce qui aurait été assurément la vraie idée du film!) car ils s’enliseront à vouloir expliquer absolument toutes les pistes qu’ils ont ouvertes.


Là ou The boy tirait sa force en entretenant un mystère fabuleux dans ses enjeux dramatiques avec son héroïne en proie au doute, j’ai commencé clairement à déchanter quand rentre dans le récit un personnage lié au passé de Greta qui ne suffira pas à masquer l’incompétence des scénaristes à proposer une fin digne de la proposition de cinéma et de sa mécanique hypnotique. Il manquera d’ailleurs quelques éléments restant sans réponse ce qui ajoutera encore plus à ma déception quant à l’identité véritable de Brahms.


Mais je ne serais pas non plus trop dur avec ce film car j’ai marché à fond pendant quasiment toute la durée du métrage. Cela faisait très longtemps qu’un film ne m’avait pas effrayé de la sorte – et ce malgré un VF rebutante – avec une utilisation minimale d’effet visuel et sonore, stigmates qui polluent parfois un peu trop ce type de film d’horreur.


Soucieux de ne pas se reposer uniquement sur les codes d’un genre hyper balisé, c’est davantage sur la protagoniste qu’on se projette car ses peurs et ses doutes contaminent à merveille le spectateur. Dans la lignée des huis-clos horrifiques – et ce, même s’il ne révolutionne rien dans le fond et la forme – The boy a au moins le mérite d’être un spectacle artisanal humble et intègre qui ne prend pas (trop) son public pour des imbéciles … et c’est déjà pas mal.

Mathieu_Babhop
6
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le 18 août 2016

Critique lue 275 fois

Mathieu_Babhop

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