C’est toujours délicat de savoir comment traiter des “freaks” en restant respectueux des humains alors que notre côté voyeur est irrésistiblement aimanté par les bizarreries de la nature.
Barnum est celui qui a compris l’importance de cette fascination et qui a su vendre un spectacle en mêlant curiosités réelles et créations fantastiques.
On peut le voir comme un visionnaire, un poète, un filou, un philanthrope ou un investisseur/exploiteur sans scrupules.
A partir de là difficile de faire une biographie qui évite les écueils.
Choisir le style de la comédie musicale, c’est annoncer d’emblée qu’on va éviter de se prendre au sérieux, et qu’on a conscience que ce qu’on raconte est une fable.
Le résultat est aussi loufoque que son personnage central et permet de déjouer les levées de bouclier sur le traitement inhumain des phénomènes de foire.
On sait qu’il ne sert à rien de chercher la véracité de l’histoire: le postulat c’est qu’un certain Barnum a eu l’idée de réunir des êtres extraordinaires pour en faire un spectacle.
Le film sera donc à l’image des créations de Barnum: préférant l’emballage au fond, n’hésitant pas à rajouter de la dorure, du rembourrage et des plumes partout histoire de maintenir le spectateur dans une sorte de rêve.
Et le papier cadeau est beau: ça foisonne de couleurs, au point qu’on est emporté par des décors et costumes qui n’essaient pas d’être réalistes mais sont là pour inviter au rêve.
Barnum veut mettre en spectacle ce que lui dicte son imagination, le film nous propose une histoire romancée à l’extrême, pétrie de bons sentiments, de jolis passages, et surtout rythmée par des chorégraphies et une réalisation dynamiques.
C’est beau à regarder, on pense forcément à “moulin rouge”, et au milieu de tout ça la lumière qui éclaire l’ensemble s’appelle Hugh Jackman.
L’acteur dont on connaît déjà les talents de danseur est réellement LE showman jusqu’au bout des ongles: sa prestation sonne comme une évidence, et l’appréciation qu’on porte à l’acteur rejaillit sur le film.
Face à lui le petit Zac Efron peine un peu à exister, pourtant il est moins tête à claque qu’on l’attendait et s’en sort surtout grâce à un rôle qui le pose en gentil de l’histoire. C’est sur les parties dansées qu’on le sent moins à son aise, moins évident que son aîné.
Le reste de la bande est agréable et fait avec les miettes qu’on leur laisse.
Des défauts, le film en a, et le principal est de taille puisqu’il s’agit de la partie musicale.
Autant sur le chant en lui-même on peut apprécier l’effort (à condition bien sûr d’aimer les comédies musicales, sinon on passe plusieurs sales quarts d’heures), autant sur la partie instrumentale ça coince.
Tout est fait à la sauce pop moderne et on est loin de la classe qu’aurait pu procurer une vraie orchestration et pas une soupe insipide pré-machée.
Le point d’orgue étant l’intervention dans l’intrigue d’une cantatrice suédoise qui soit enchanter le public et dont on attend un récital à la hauteur d’une Maiwen dans le 5ème élément. Déception assurée dès que le show commence et qu’on est face à un morceau quelconque.
L’histoire est très simpliste, mais d’un autre côté on se doute dès le départ de ce qui nous attend, la seule chose qui peut surprendre c’est que Barnum n’est pas le sauveur sur son cheval blanc, il se perd dans sa soif de profit, il renie ceux qui lui ont permis d’asseoir sa notoriété.
Bref, le film essaie d’assombrir légèrement le personnage histoire de créer une intrigue et peut être aussi pour rappeler que même s’il n’entre pas dans les détails, il n’est pas dupe des reproches qu’on peut faire aux motivations du héros.
On ressort de là divertis, mais certainement pas aussi retourné et perturbé qu’on pouvait l’être par “the freak show” ou “elephant man”, c’est qu’on ne joue pas dans le même cirque.
D’ailleurs en parlant de cirque c’est assez étonnant que le film s’arrête quand débute l’épopée circassienne grâce à laquelle le barnum est devenu un nom de tente, sans doute pour des raisons de facilité de tournage.
C’est simple, c’est festif, et c’est avec ce magicien de Hugh Jackman.
On passe un grand moment, et c’est bien le principal.